Vivre le Marais, Vivre Paris Centre !

Chronique de la vie au cœur et autour du centre historique de Paris

Année : 2009

  • Pastourelle 35 avec grilles 

    L'immeuble de France Telecom, 35 rue Pastourelle (IIIe), à l'angle rue du Temple. Depuis une dizaine de jours, sur demande du Maire Pierre Aidenbaum, les arcades sont condamnées par une grille.

     

    Depuis plusieurs mois, les arcades étaient occupées par une douzaine de personnes sans domicile, qui y avaient établi le leur dans les conditions précaires que nous connaissons. La vie des riverains alentour était devenue difficile à cause de l'insalubrité et de l'insécurité qui en résultaient.

    Avec beaucoup d'humanité, et en prenant son temps, le Maire, avec l'aide de la police, du SAMU social, des maraudeurs d'Emaüs et des services de la Propreté de Paris, a réglé la situation au mieux de chacun des cas sociaux identifiés. Sauf un, le Maire en convient, que par discrétion il n'a pas souhaité décrire.

    Les arcades dûment évacuées, nettoyées et désinfectées, ont été alors interdites d'accès par les grilles que nous voyons sur la photo.

    De façon provisoire, bien entendu.

    Nous indiquions, dans un article du 7 novembre 2008 blog/2008/11/index.html, qu'une décision de la Ville de préempter le bâtiment, sur une vente conclue entre France Telecom et une société de rénovation (avec une décote de 40% sur le prix convenu), avait conduit les parties devant les tribunaux. La Ville fut déboutée en première instance. La décision de la Mairie de Paris de faire appel, repoussait l'issue de l'affaire aux calendes grecques, avec des risques évidents que la situation s'envenime avec les occupants des arcades et les riverains. On pouvait même craindre la transformation de l'immeuble en squat.

    Aux dernières nouvelles, le Maire aurait décidé d'interrompre la procédure d'appel et de laisser la transaction immobilière s'exécuter, en contrepartie de l'engagement du rénovateur de céder à la Ville, après travaux, une part importante de l'immeuble (on parle de 25% de la surface habitable) à un prix compatible avec une offre de logements à loyers modérés.

    C'est le résultat d'un pragmatisme bien inspiré vers une issue où chacun est gagnant. Les travaux pourraient être achevés d'ici vingt mois. Les grilles seront déposées dans l'intervalle, quand les travaux seront au stade où les arcades seront fermées définitivement, l'espace intérieur (qui n'appartient pas à la Ville mais au propriétaire, dans ce cas) étant récupéré à usage d'habitation ou d'activité économique.

    Mots-clés : 35 rue Pastourelle, Temple, grille sur arcades, France Telecom, préemption Mairie de Paris, logement social

     

  • Temple devantures (4) 

    Nous avons publié cette photo en septembre 2006 pour souligner à quel point il est choquant que des commerçants mal inspirés portent atteinte au patrimoine du Marais. Il s'agit ici d'un immeuble à façade Louis XV avec baies cintrées, porte cochère et linteau d'origine, situé au n° 81 de la rue du Temple (IIIe).

     

    Rappelons que les devantures et enseignes sont réglementées par le plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) du Marais, mais une prescription de trois ans sur les travaux effectués retire à la Mairie de Paris et aux Bâtiments de France toute possibilité d'agir sur les réalisations anciennes. Ils doivent attendre, pour intervenir, un changement d'enseigne, ou des travaux de rénovation. De même et paradoxalement, quand un immeuble est enjoint de ravaler sa façade, les commerces ne sont pas visés.

    Justement, le magasin de gauche, grossiste en maroquinerie (qui n'est pourtant pas le pire), a décidé récemment de refaire sa devanture, sans changer pour autant d'enseigne. Voici le résultat :

    Temple 81 vue générale 

    Incontestablement il est désormais moins laid que ses voisins d'immeuble. Le caisson externe a été retiré. L'enseigne est discrète. Est-il pour autant conforme au règlement du Marais ? pas sûr !

                               

    Une fois de plus, les travaux ont été effectués sans autorisation. Les commerçants se défendent en protestant "qu'il faut faire des papiers" et que c'est compliqué. Nous l'avons souligné dans nos analyses de la gestion quotidienne du PSMV dans les deux arrondissements du Marais : les mairies d'arrondissements sont malheureusement passives à cet égard. Elles auraient besoin d'adopter une attitude plus dynamique face aux commerces, les informer de leurs obligations, veiller aux travaux qu'elles entreprennent et les aider dans leurs démarches.

    Avant les élections municipales, la Maire du IVe, Dominique Bertinotti, nous avait assurés qu'elle créerait une structure pour le suivi de ces dossiers Voir lettre. Le Maire du IIIe, Pierre Aidenbaum avait engagé une négociation avec une association de commerçants pour la signature d'une "charte" de bonne conduite. Ces intentions, pour le moment, n'ont pas été suivies d'effet.

    Il y a en France une centaine de secteurs sauvegardés. Les municipalités qui en ont un, le considèrent généralement comme un atout pour leur développement et font tout pour en assurer la promotion. A titre d'exemple, voyez le site de la mairie de Pézenas secteur sauvegardé de Pézenas.

    Revenons chez nous, dans l'affaire qui nous occupe, la Direction de l'Urbanisme (paysage de la rue) de la Mairie de Paris, va faire son constat, demandera l'avis de l'Architecte des Bâtiments de France, et réclamera vraisemblablement un dossier de régularisation. Il est possible qu'elle exige des modifications car les travaux n'ont pas été exécutés, semble-t-il, dans les règles de l'art (voir notre site Internet réglementation enseignes et devantures). On sait dans ce cas, par expérience, qu'il faut des mois ou des années pour que les choses rentrent dans l'ordre quand elles ne restent pas tout simplement en l'état.

    La révision du PSMV, dont les travaux sont lancés, devrait intégrer cette problématique car il ne sert à rien de sauvegarder le Marais si l'anarchie se perpétue dans l'esthétique des commerces, qui en sont la vitrine aux yeux des passants.

                                                          

    Mots-clés : PSMV, plan sauvegarde mise en valeur Marais, grossistes, devantures, enseignes, Temple

       

  • Canari clocher palmiers    

    Le site inscrit "Cap Corse côte occidentale". Plus de 6.000 ha protégés. Site Angèle Paoli

     

    C'est un tremblement de terre qui vient d'avoir lieu chez les défenseurs du patrimoine français : le Parlement a voté le 24 janvier la suppression de "l'avis conforme" des ABF (Architectes des Bâtiments de France), aux permis de construire et autorisations de travaux dans les "ZPPAUP" (zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, instaurées par la loi du 8 janvier 1993).

    Il existe 473 "ZPPAUP" en France. Il s'agit de sites remarquables par la présence de monuments historiques ou la qualité de l'urbanisme et des paysages. Elles ont remplacé la notion antérieure de périmètre de protection de 500 mètres autour d'un monument. Il n'y a pas de "ZPPAUP" à Paris mais deux secteurs sauvegardés (Marais et VIIe arrondissement) et une "protection Ville de Paris" qui couvre 5.000 immeubles.

    Le retrait aux ABF du pouvoir d'avis conforme, les prive de leur moyen d'action. Faute de disposer de budgets d'intervention, leur influence sur l'évolution des paysages dépendait de leur pouvoir d'autoriser ou non les travaux et fondait leur autorité.

    Les associations françaises du patrimoine et des paysages, autour de leur fédération, demandent au gouvernement "de revenir sur cet amendement qui abroge un siècle d'organisation et de progrès de la protection du patrimoine et des paysages de France".

    Nous suivons cette affaire avec attention, parce qu'elle nous touche au coeur mais aussi pour le risque de dérive qu'elle comporte à l'égard des secteurs sauvegardés, comme le Marais et une centaine d'autres en France. Il serait regrettable que des circonstances exceptionnelles qui incitent à dynamiser par tous les moyens la consommation, conduisent à sacrifier les atouts qui font l'attractivité et le succès de notre pays, à savoir son histoire, son architecture, ses paysages, sa culture et son art de vivre.

                                                                                                                                            

    Mots-clés : ZPPAUP, sites inscrits protégés, sites sauvegardés, avis conforme, ABF, architectes bâtiments de France, cap corse

    Post-scriptum du 25 février : on a appris depuis que le conseil constitutionnel, saisi notamment par Yves Dauge, président de la commission nationale des secteurs sauvegardés, sénateur-maire de Chinon, a demandé au gouvernenemt de retirer cet article de loi, considéré non conforme à la constitution, essentiellement pour des raisons de forme. Le danger est donc écarté mais pas supprimé.

                                                                                                                               

                                                                                                                                        

  • Haudriettes soleil d'hiver 

    Carrefour Temple-Haudriettes, jardinet récent sur fresque de Catherine Feff, à l'emplacement de "l'Echelle du Temple" qui était l'instrument de haute justice où les auteurs de larcins sur les terres des Templiers subissaient leur juste châtiment. La placette porte désormais le nom d'une poétesse confidentielle, disciple de Sapho, Renée Vivien. (photo G. Simonet)

     

    Il est précisé que l'échelle ne doit pas être confondue avec le gibet où les criminels étaient pendus haut et court. L'échelle est l'instrument punitif des juridictions ecclésiastiques comme celle des Templiers, qui n'ont pas le droit de condamner à mort. Ainsi étaient punis de peines corporelles mais non capitales, et rendus infâmes aux yeux de la population, ceux "qui étaient convaincus d'avoir à leur escient épousé deux femmes en même temps" (chroniques des XIIIe/XIVe siècles).

    Nous qui, hommes ou femmes, passons par là avec une faute mal effacée sur la conscience, devons nous dire qu'il est bon tout compte fait de vivre en 2009, malgré la crise.

    Mots-clés : échelle du Temple, Haudriettes, Catherine Feff

                                                                                                                                      

  • Réaumur 39 art nouveau  

    Le IIIe, c'est pour les trois-quarts le secteur sauvegardé du Marais, avec son architecture majoritairement XVIIe et XVIIIe siècles mais c'est aussi, en lisière et sur les artères qui le quadrillent, une grande variété de styles, notamment "Art Nouveau", comme cet immeuble remarquable du 39 rue Réaumur (voir "album photos"), mais aussi haussmannien, "Art Déco" et ce qu'Alexandre Gady qualifie "d'architecture bavarde", à propos de la rue des Archives.

     

    Sociologiquement, aussi, le IIIe est diversifié. Les classes moyennes et modestes y sont très présentes, en dépit d'un mouvement de "gentryfication" rampante, tandis que l'activité économique s'oriente vers le luxe et la valeur ajoutée, au détriment d'un artisanat qui appartient de plus en plus au passé, et de commerces de proximité qui souffrent autant de la désaffection des ménages, dont le mode de vie et de consommation change, que de la concurrence d'autres acteurs.

    Dans cet arrondissement très dense (jusqu'à 450 hab/ha dans le secteur Beaubourg-Temple c/240 en moyenne à Paris - source ETUDE APUR 2007 ), l'immobilier est devenu cher. Le IIIe ne rivalise pas encore avec les VIe, VIIe ou son proche parent le IVe, mais on a vu le m² neuf dépasser les 11.000 € et l'ancien, qui valait à peine 1.200 € en 1982, atteindre 6 à 7.000 € aujourd'hui.

    Ceux qui ont acheté au bon moment, des logements "à rafraîchir", ont la satisfaction (toute théorique car s'ils vendaient ils devraient se reloger aux conditions actuelles) de disposer d'un patrimoine, mais ceux qui n'ont pas la chance d'être logés par la Ville de Paris dans les différents immeubles qu'elle gère, ont vu leurs loyers augmenter comme le prix de l'immobilier et doivent souvent s'exiler pour habiter un logement en rapport avec leurs moyens ou la taille de leur famille.

    Les tendances constatées pour l'arrondissement soulèvent donc des interrogations qui s'ajoutent, dans le IIIe, aux nuisances causées par le monopole des commerces de gros dans sa partie nord-ouest, au gel de plus de 100 logements au profit de l'entreposage de marchandises, et aux dérives festives qui ne se cantonnent plus désormais au points chauds du secteur Archives-Sainte- Croix (IVe) qui s'est vidé en quelques années d'une population qui ne supportait plus la foule et le bruit. Les activités nocturnes se sont étendues vers le IIIe pour s'installer le long de l'axe La Perle, Quatre-Fils, Haudriettes et Michel le Comte et sont considérées par la population comme une menace croissante pour leur tranquillité.

    La zone touristique, symbolisée par la rue des Francs-Bourgeois, vit actuellement une expérience de "piétonnisation" le dimanche. Les riverains se divisent en deux camps : ceux qui approuvent et ceux qui combattent la mesure. La décision finale, en mars, fera nécessairement un perdant. Il faut imaginer pour l'avenir une formule où chacun s'y retrouve.

    Le Maire Pierre Aidenbaum a pris la décision d'organiser un débat général sur le thème de l'avenir à long terme de l'arrondissement. La question posée aux habitants est celle-ci : comment voyez-vous le IIIe dans dix ans ?

    Cette question simple en apparence en contient deux très différentes en réalité, à savoir : à votre avis, où va le IIIe ?  et  dans quel sens voudriez-vous qu'il aille ? Avec un corollaire : comment façonner le changement ?

    Le sujet en tout cas est intéressant. Pour le traiter, le Maire a rassemblé ses proches dans un "premier cercle" : élus de la majorité de l'arrondissement, membres du parti socialiste, atelier local d'urbanisme du IIIe et présidents des anciens conseils de quartiers. Ce premier cercle a produit un "mémoire" bien construit autour de scénarios qui vont du plus conservateur au plus déjanté. Il va servir de cadre aux ateliers-débats qui se tiendront d'ici fin avril.

    Nous y apporterons notre contribution avec l'indépendance d'esprit, l'absence de doctrine et le pragmatisme qui nous caractérisent. En ne perdant pas de vue ces vérités apprises en entreprise que le long terme n'est que la somme des courts termes et que prédire est un art difficile, surtout lorsqu'il s'agit de l'avenir.

    Mots-clés : avenir IIIe arrondissement, Maire Pierre Aidenbaum, urbanisme, Beaubourg Temple, activités festives, mono activité, entreposage