Vivre le Marais, Vivre Paris Centre !

Chronique de la vie au cœur et autour du centre historique de Paris

Année : 2013

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    La synagogue du 21 bis, rue des Tournelles IVe

     

    C’est en 1872 que débutent les travaux de construction de la synagogue de la rue des Tournelles (IVe) au N° 21 bis. Ils s’achèveront 4 ans plus tard et la consécration aura lieu le 15 septembre 1876. Ce projet né en 1865, suite à une délibération du Conseil Municipal de Paris, répondait d’abord au souhait exprimé par Napoléon III de mieux intégrer les juifs à la Nation mais aussi au besoin de donner des lieux de culte (la Grande synagogue de la rue des Victoires IXe et celle de la rue des Tournelles ont été construites en même temps) aux nombreux « émigrés » juifs installés dans le Marais puis ceux venus de l’Alsace- Lorraine passée sous le joug prussien. Plus tard ce lieu sera aussi celui des émigrés de la communauté ashkénaze arrivés de différents pays d’Europe Centrale, de Pologne et de Russie.

    Le bâtiment est souvent qualifié de style « romano-byzantin », mais surtout il a été conçu comme s'il s'agissait d'une église. En effet, l’architecte retenu, Marcellin-Emmanuel Varcollier, un ancien élève de Baltard qui a construit la Mairie du XVIIIe, n’avait jamais édifié de synagogue avant celle-ci. Il n’a pas donc pas hésité à installer à l’intérieur de l’édifice deux éléments anachroniques dans une synagogue, une chaire et un orgue ! Il prit d’emblée le parti d’utiliser le fer très en vogue à l’époque comme élément du décor architectural, ce qui donne une allure très élancée à l’espace. Les matériaux ont été produits par les Ateliers de Normandie qui étaient en relation avec Gustave Eiffel.

    La façade principale située rue des Tournelles (car il existait une entrée 14 place des Vosges) est assez imposante car il s’agit de la deuxième plus grande synagogue de Paris avec plus de 1300 places, longue de 50 m et large de plus de 20 m. Elle comprend une partie centrale et deux côtés formant pendant. Elle est ornée d’une rosace et de 3 fenêtres entre lesquelles sont sculptées les armes de Paris, les rouleaux de la Loi et un texte en hébreu tiré des psaumes qui commence par « Ouvre moi les portes du salut….».

     

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    Intérieur de la synagogue et la struture en métal

     

    Après avoir franchi un péristyle, nous nous trouvons dans la nef qui se termine par une seconde nef semi circulaire. Des poutrelles et arcades ouvragées de métal reposent sur des piliers de chaque côté formant des tribunes sur deux étages. L’ensemble est très harmonieux, bien proportionné et agréable à l’œil. Il faut aussi souligner que l’édifice tourne le dos à Jérusalem, une façon de monter que l’on entre dans la Nation française et que l’on quitte la Nation juive.
    Le bâtiment a été endommagé lors de l’affaire Dreyfus à la fin du XIXe siècle. Réservé à la communauté ashkénaze décimée lors de la guerre, la synagogue de la rue des Tournelles accueille aujourd’hui les séfarades, les ashkénazes pratiquant leur culte de l’autre côté qui lui est accolé, place des Vosges.

    Le monument a été classé en 1987, il est un témoin très intéressant de l’architecture du XIXe siècle et de la volonté politique du Second Empire et de la IIIe République naissante
    de donner en France toute sa place au judaïsme.

    Dominique Feutry

     

  • Haudriettes soleil d'hiver

    Placette carrefour Temple-Haudriettes (IIIe), emplacement de "l'Echelle du Temple" (*), baptisée Renée Vivien, du nom d'une poétesse à la renommée confidentielle

              

    Il fallait à cette époque donner des noms féminins à tout ce qui n'en avait pas. Il y a eu en France et de par le monde, une foule de femmes de valeur. Loin de nous l'idée d'établir un classement mais celle qui a donné son nom à cette placette n'a pas laissé de trace indélébile dans notre mémoire collective.

    C'est pourtant "place Renée Vivien" qu'elle s'appelle. Pour toujours ? Le Maire du IIIe Pierre Aidenbaum regrette peut-être ce choix car, avec Anne Hidalgo, Maire-Adjoint de Paris chargée de l'urbanisme et candidate à la succession de Bertrand Delanoë, ils se proposent de rayer la placette de la carte de Paris.

    On a peine à le croire. On est dans un quartier à forte densité, sans "respiration", qui atteint des records de concentration – en 2007, l'APUR (atelier parisien d'urbanisme – Marie de Paris) estimait sa densité à 450 habitants par hectare, pour une moyenne de 240 à Paris (dossier Beaubourg-Temple). Va-t-on s'acharner à construire encore ?

    On peut le craindre. La délibération prise en conseil de Paris le 13 novembre 2012 (texte intégral, voir en haut de la page 17) qui fixe les contours du PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) du Marais, le confirme. Interrogé à ce sujet, le Maire du IIIe Pierre Aidenbaum nous disait il y a un mois que c'était "un vague projet".

    On en trouve pourtant confirmation dans le dossier d'enquête publique que chacun peut consulter dès maintenant dans les mairies des IIIe et IVe arrondissements. Il consacre le caractère constructible de la placette et le projet d'y établir une crèche !

    L'association et les riverains concernés ont toutes les raisons de s'y opposer avec vigueur. Les espaces libres et la végétation sont si rares dans le secteur que ceux qui y vivent tiennent à conserver le peu d'espace et de verdure qui leur est octroyé.

    La placette est un lieu de passage et de repos avec ses quatre bancs publics. Le sol est classé domaine viaire et le sous-sol abrite les nombreuses servitudes de passage et d'accès dont témoignent les plaques et trappes de visite visibles parmi les dalles du sol (chauffage urbain, assainissement, EDF/GDF, eau, téléphone, fibre optique …)

    Le mur mitoyen du 78 rue du Temple dont les pierres apparentes ont été mises en valeur sur le soubassement, a reçu un enduit il y a une douzaine d'années qui sert de support à une fresque de Catherine Feff, qui a reçu une approbation unanime. Baptisée "l'Esprit des Lieux", elle est un élément du décor quotidien des riverains. Va-t-on le leur retirer ? De la même manière, qu'en serait-il des fenêtres existantes sur ce mur ?

    La plus grave des interrogations concerne la crèche. Sur la rue des Haudriettes, en direction de Michel le Comte ou du Temple, le trafic est dense et le carrefour sensible. Du fait de la présence de grossistes, dont les livraisons se font en pleine voie, les bouchons sont fréquents et avec eux les concerts de klaxons et une pollution élevée aux dioxydes d'azote et aux particules fines cancérigènes. AIRPARIF recommande de ne pas exposer de personnes fragiles à moins de 40 mètres d'un axe de circulation. On serait ici à deux ou trois mètres ! Va-t-on ainsi faire courir ce risque à des nourrissons ?

    Il arrive que des décisions aient des conséquences très graves. Si celle-ci est confirmée, nous ferons en sorte que ce projet ne voie pas le jour.

     

    (*) "L'Echelle du Temple" était l'instrument de "haute justice" où les auteurs de larcins sur les terres des Templiers subissaient leur juste châtiment. Exposés à la foule, ils en subissaient l'opprobre.

     

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    La pietà de Delacroix. Eglise Saint-Denys du Saint-Sacrement, 68 rue de Turenne (IIIe)

     

    Beaucoup de ceux qui empruntent la rue de Turenne et passent devant l’église Saint Denys du Saint Sacrement au N° 68 sont attirés par son péristyle à colonnades orné d’un fronton triangulaire décoré par le sculpteur Jean-Jacques Feuchère qui est aussi l’auteur de la statue dite « la loi » place de Palais Bourbon. Nous sommes en présence d’une construction typique du XIXe siècle due aux talents d’Hyppolyte Godde (1781-1869) architecte de la Ville de Paris qui l’acheva en 1835. On doit aussi à ce dernier les églises Notre Dame de Bonne Nouvelle et Saint-Pierre du Gros Caillou. Mais peu nombreux sont les passants qui peuvent imaginer que c‘est une peinture de Delacroix qui constitue aujourd’hui, de l’avis de tous les spécialistes, la pièce maîtresse, le chef d’œuvre de cette église. Cette célèbre pietà est située dans la chapelle Sainte Geneviève où est installée une statue de la sainte, exécutée en 1868,  due au burin de Jean-Joseph Perraud (Prix de Rome dont les plus belles réalisations sont visibles au Musée d’Orsay).

    La superbe Pietà, dite aussi "Déposition de la Croix" d’Eugène Delacroix, fait suite à une commande du Préfet Rambuteau. La réalisation de ce tableau avait été d’abord demandée à un autre peintre Robert-Fleury (dont les œuvres principales sont notamment exposées aux musées du Louvre, de Chantilly, de Versailles et de Pau) qui a préféré solliciter Delacroix pour l’exécuter. Comme les rapports entre Delacroix et l’Administration d’alors ne sont pas très bons, ce dernier doit batailler avec la Préfecture et notamment le chef des Beaux-Arts pour se voir confirmer la commande.

    Les atermoiements et les obstacles furent nombreux entre ceux qui donnaient des avis et ceux qui ne se pressaient pas pour signer. Il est vrai que le tableau fut payé 6 000 francs. Ainsi la commission des Beaux-Arts interrogée sur les esquisses demanda d’enlever des anges, le curé de la paroisse soutenu par son Conseil de Fabrique s’opposa au thème de la pietà trop courant. Des problèmes d’enduit non posé à temps, car la peinture à l’huile est exécutée à même le mur, retardent encore l’exécution du travail et ce n’est que 5 ans après la passation de la première commande que la pietà est présentée au public. Les critiques sont partagées. Certains parlent de charlatanisme, « …cinq ans d’attente pour arriver à un résultat aussi lamentable… ». D’autres écrivent que c’est «…une chose incroyable… ». Le mot de la fin est de la plume de Baudelaire pour qui «ce chef d’œuvre laisse dans l’esprit un sillon de mélancolie ».

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    Portait d'Eugène Delacroix

    La gageure n’était pas simple pour Delacroix car outre les arcanes de l’Administration et l’opposition du curé, il a dû composer aussi avec l’emplacement sombre de la chapelle. Il a travaillé en hiver les jours où la luminosité est la plus forte. Or il constate que son assistant a utilisé des couleurs trop sombres et doit reprendre son travail (plusieurs dizaines de séances seront nécessaires) même s’il ne parvient pas finalement vraiment aux teintes souhaitées. Le tableau est donc sombre dans un lieu sombre. Néanmoins en l’observant, surtout en l'absence d'éclairage artificiel, nous nous rendons compte de l’intensité de l’exécution, des contrastes voulus entre le fond obscur et la lumière de personnages principaux, la Vierge, bras étendus et le Christ, sur les genoux de sa mère, avec une utilisation très étudiée du rouge. Petit détail, on distingue dans le fond du tableau, le peintre et son assistant!

    Dominique Feutry

     

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    Maison dite de Nicolas Flamel au 51, rue de Montmorency (IIIe)

     

    A la frontière du Marais se trouve la Maison dite de Nicolas Flamel, 51 de la rue de Montmorency. Elle date de 1407 et serait avec sa façade typique des XIVe et XVe siècles la plus vieille sinon une des plus vieilles demeures de Paris. En fait, il est peu probable que Nicolas Flamel l'ait habitée et il semble plutôt que cette maison servait à loger gratuitement des laboureurs et des maraîchers en échange de prières, ces derniers travaillant dans les terres alentours. Quant aux boutiques elles étaient louées.

     Qui était vraiment Nicolas Flamel (1330 ou 1340-1418)? On dit de lui qu'il était un écrivain, disposant d'un atelier de copiste civil. Il était aussi libraire-juré de l'université de Paris mais une personne qui devint suffisamment riche, ce qui lui permettait de faire des dons importants en nombre aux églises (en particulier Saint-Jacques de la Boucherie dont il ne reste plus que la tour rue de Rivoli), aux hôpitaux, pour que le roi Charles VI demandât une enquête poussée à son sujet. Interrogé, l'intéressé n'avoua pas être un alchimiste ayant découvert le principe de la pierre philosophale qui permettait de muer tous les vils métaux en or. En réalité il s'était marié avec une femme appelée Pernelle deux fois veuve dont il héritera à sa mort en 1397. Cette succession suite à un legs mutuel a d'ailleurs été portée en vain devant les tribunaux par les parents de la défunte.

     

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    Gravure de Nicolas Flamel

    Ce n'est qu'après la mort de Nicolas Flamel lui-même que se répandit l'idée de l'alchimiste car il détenait pas mal de biens ce qui était inhabituel pour un homme qui n'était pas d'origine noble. Mais au fil des années n'a t-on pas exagéré celle-ci ? Les maisons qu'il détenait n'étaient pas toujours en bon état, nous savons qu'il a aussi bénéficié de spéculations immobilières. Mais voilà, les fortunes bourgeoises en opposition à celles normales des nobles se voyaient taxées aux XVe et XVe siècles d'être d'origine alchimique. Ne l'a t-on pas dit de Jacques Coeur ?

    Nicolas Flamel a beaucoup oeuvré pour financer des constructions du cimetière des Innocents (arcades sculptées, chapelles, charniers…). Sur certaines d'entre elles il était possible de trouver des sculptures allégoriques assimilées à la représentation de l'alchimie. D'où une interprétation facile à imaginer. Sans doute est-ce donc la légende qui est à l'origine de la confusion entre Nicolas Flamel et l'alchimie. Phénomène amplifié par le temps qui s'est mué en vérité grâce aussi aux écrits d'écrivains tels Gérard de Nerval, qui a consacré l'une de ses oeuvres à Nicolas Flamel.

    Alors doit-on casser le mythe ou laisser subsister le doute, sachant que personne n'a vraiment jamais eu de réponse formelle quant à la véracité de l'une ou l'autre des deux thèses ?

    Dominique Feutry

     

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    La façade de la boutique sans nom du 42, rue de Sévigné (IIIe). (Photo VLM)

     

    Au N° 42 de la rue de Sévigné (IIIe), face au lycée Victor Hugo, est installée depuis peu une nouvelle boutique, peinte de couleur bleue assez doux, et qui attire l’œil du passant car aucun nom n'est inscrit . La curiosité aidant, il suffit donc de bien regarder, s'ouvre alors à nous un long local de 65 m2, un espace très sobre, une sorte de petite galerie.

    Nous sommes en présence d'un nouveau concept de magasin entièrement consacré aux modèles haut de gamme de la marque Adidas ! Plutôt mode et moins sport, il s'agit de la première implantation de ce type à Paris. D'autres ont déjà été réalisées à Londres et à Berlin. Les murs intérieurs sont cirés mais abîmés d'apparence, une fausse verrière dont des spots reconstituent la lumière du jour est supportée par des poutrelles métalliques. Le plâtre, le béton et l'acier dominent. Le must est donc de se retrouver dans une boutique Adidas sans imaginer qu'elle pouvait être implantée à cet endroit. Le nec plus ultra de l'abstraction en matière de vente… et cerise sur le gâteau, il existe derrière cette surface de vente, un autre espace de 340 m2 masqué par une cloison d'acier. Il sera consacré aux animations artistiques.

     

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    Intérieur de la boutique N° 42 rue de Sévigné (IIIe)

    Pour l'anecdote, précisons que le groupe Adidas était à l'origine une petite entreprise de pantoufles appartenant à un savetier bavarois du nom de Dassler. Lorsque les 2 fils héritent de l'affaire, ils fabriquent  des chaussures de sport. Le nom de la marque est la réunion du surmon "Adi" d'un des frères prénommé Adolphe et de "Das", 1ère syllabbe de Dassler. A la suite de démêlés avec les autorités américaines consécutifs à la Seconde Guerre Mondiale, les deux frères deviendront des ennemis et lorsqu'ils pourront reprendre les rênes de l'affaire après que leurs femmes respectives aient assuré une sorte d'intérim durant leur absence, l'un d' eux préféra partir et créer sa propre entreprise. Il s'agit de Puma !

    Un "remake" de cette mésentente familiale s'est aussi produit en France entre les frères Veron puisque l'un d'eux restera à la tête des voitures miniatures Majorette alors que son frère créera Norev (Veron en verlan) qui deviendra son concurrent direct ! Pour revenir à Adidas, nous nous souvenons de la reprise de cette affaire par Bernard Tapie puis des différents développements qui s'en suivirent et des difficutés, surmontées depuis lors, de l'entreprise. Aujourd'hui Adidas qui contrôle aussi Reebock est cotée en Bourse depuis 1998.

    Nous nous réjouissons de l'arrivée de cette enseigne, parmi les 10 marques les plus connues au monde, qui a choisi notre quartier pour implanter en France son nouveau concept, ce qui démontre que le Marais est aussi autre chose qu'un ensemble muséal.

    Dominique Feutry

     

  • Vosges 9 ambroisie entrée 18 02 13 

    Sobriété et distinction. Sous les arcades de la place des Vosges, ce restaurant, qui fait partie du patrimoine du Marais, est digne en tout point du cadre exceptionnel qui l'entoure (photo VlM)

     

    Bernard Pacaud crée l'Ambroisie en 1981 quai de la tournelle dans le Ve. Très vite, ce chef surdoué s'attire les faveurs d'un public de connaisseurs. Dix mois plus tard il obtient sa première étoile Michelin, un an après sa deuxième.

    En 1986, il se déplace au 9 place des Vosges dans le IVe, où il prend possession du local d'un joaillier. Il obtient sa troisième étoile en 1988 et ne l'a jamais quittée depuis. Au sein du club prestigieux des trois étoiles de Paris (ils sont 10 à Paris et 27 en France), il est le plus ancien dans cette distinction.

    Bernard et son fils Matthieu (32 ans) règnent sur la cuisine. Danièle est à l'accueil et veille sur la salle avec le maître d'hôtel M. Vetaux.

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     Danièle Pacaud et le maitre d'hôtel à gauche (photo VlM), Bernard Pacaud à droite

     

    La carte est sompteuse. Renouvelée tous les trois mois, elle s'appuie sur les produits de saison. Entrées et plats recourent à la truffe en ce moment : oeuf en île flottante sur coulis de truffe, aspic de foie gras à la truffe, feuilleté de truffe et salade de mâche, Mont d'Or à la truffe. Les crustacés occupent aussi une place de choix : feuillantine de langoustines, noix de Saint-Jacques, fricassée de homard, matelote de baudroie aux écrevisses….

    La carte des vins fait tourner la tête avant même d'y goûter. Un choix de dix millésimes de Montrachet, le plus grand des blancs de Bourgogne, donc du monde ! Un Pétrus 1995, dans les Pomerol. De la Romanée-Conti, dans la Côte de Nuits, réputée introuvable …. Des vins inaccessibles au commun des mortels mais nous sommes ici dans la demeure des Dieux de l'Olympe, dont le nectar était la boisson et l'ambroisie la nourriture, à ce qu'on dit.

    Il faut bien sûr casser sa tirelire avant de s'y rendre. Les entrées sont à 100 € en moyenne, les plats varient de 95 à 240 €, les fromages/desserts autour de 30 €. Pour les vins, il n'y a pas de limite. Si une bouteille honorable peut coûter autour de 300 €, les plus prestigieux dépassent 10.000 € !

    Il ne faut pas s'en offusquer. Ces artistes de la table travaillent pour le rayonnement de la France et pour l'équilibre de nos échanges. Leurs clients viennent du monde entier. S'il existe encore une clientèle locale, on assiste au déferlement de ressortissants de pays qui sont devenus nos créanciers, tandis que la vieille Europe s'essouffle. Tant mieux dans le fond s'ils sont prêts, par snobisme souvent, à dépenser 30.000 € pour s'offrir un vin mythique qui est hors de notre portée. Cet argent entre dans notre économie et nous en avons bien besoin.

    Il convient d'ajouter que plus de vingt personnes extrêmement qualifiées sont nécessaires au fonctionnement de l'établissement. Un restaurant qui est condamné à l'excellence, faute de quoi les étoiles s'éteindraient les unes après les autres. Dire qu'il est cher n'a pas de sens : il coûte le prix de la perfection.

    La décoration participe au plaisir du repas. On le doit à François-Joseph Graf. Il respecte l'environnement XVIIème siècle de la place des Vosges mais ne s'en sent pas prisionnier. C'est ainsi qu'il n'a pas hésité à mélanger les genres pour le mobilier : l'art déco côtoie les styles anglais et viennois. Les tapisseries sont classiques et donnent au cadre de la chaleur et le sentiment d'être "chez soi", dans un décor irréel cependant, en attendant que résonnent les douze coups de minuit pour un retour à la réalité.

    Vosges 9 l'ambroisie-1Une des salles à manger (photo VlM)

    Dans ce restaurant d'exception, un évènement exceptionnel s'est produit. En 1997, Jacques Chirac alors président de la République, y a emmené son invité Bill Clinton. C'était une dérogation à la règle qui veut que les chefs d'Etat étrangers soient reçus à l'Elysée. Mais Jacques Chirac l'a voulu ainsi. Danièle Pacaud raconte que le quartier était envahi de gardes US armés, de fonctionnaires de la CIA, et les cuisines investies par une armée de goûteurs inquiets des risques que leur président soit empoisonné !

    Gérard Simonet

     

     

     

  • Halles canopée 18 02 13 

    Structure métallique de la Canopée (photo VlM)

     

    La Canopée fait
    couler de l’encre

    La charpente métallique de la
    Canopée étonne par son caractère massif. De l’avis de Sybille Vincendon,
    journaliste à Libération, « Cet
    entrelacs de poutres métalliques a l’air taillé pour porter une centrale
    nucléaire. Tout est mastoc, lourd, pesant, présent ».
    Rappelons que
    cette structure de 14,50 m de haut sera aussi lourde que celle de la Tour
    Eiffel, qui pèse 7 000 tonnes. Est-ce vraiment nécessaire ou est-ce un
    défaut de conception ?

    Berger et Anziutti, les
    architectes de la Canopée, ont en tout cas été récompensés en janvier par un
    prix parodique, « Le Gérard de l’architecte
    qui te chiade une superbe perspective que je te dis pas comment elle chie la
    classe pour le concours, mais une fois que tu vois le projet pour de vrai
    aujourd’hui, tu te demandes s’il se serait pas un peu foutu de ta gueule par
    hasard  (sic)».

    A propos de perspective, il est maintenant clair que,
    contrairement à ce que prétendait l’image virtuelle présentée par les
    architectes de la Canopée lors du concours, l’église Saint-Eustache disparaîtra
    presque entièrement derrière le nouveau bâtiment.

    Autre polémique, au cours de l’opération
    « portes ouvertes » du prototype de la Canopée, la SemPariSeine, qui
    conduit le projet, s’est fait prendre en flagrant délit de propagande. Une
    vidéo postée sur Youtube montre l’un des guides expliquant aux visiteurs que,
    certes, le projet actuellement réalisé aux Halles coûte cher (1 milliard
    d’euros) mais que celui qui avait été proposé par l'architecte Jean Nouvel en 2004, « avec des jardins suspendus et une
    piscine sur le toit »
    , coûtait 4 milliards d’euros. A côté, le projet
    actuel paraît presque donné… Sauf que le projet de Nouvel de 2004 n’a jamais
    été évalué à 4 milliards d’euros, mais "seulement" à 300 millions
    d’euros.

    La SemPariSeine a reconnu ce dérapage et nous a indiqué avoir donné
    aux animateurs la consigne de répondre désormais que « Le projet proposé par le cabinet Seura-Mangin, retenu par la
    Ville de Paris, était le moins coûteux des 4 projets présentés en 2004 et le
    plus simple à réaliser, notamment pour le maintien du fonctionnement, en
    sécurité, de la gare RER et du Forum pendant les travaux. »
    Rappelons
    pour mémoire que le projet Seura-Mangin n’était censé coûter, lui, que 200
    millions d’euros. Sachant que le projet atteint aujourd’hui 1 milliard, on
    mesure l’incroyable dérive financière…

    Dernière polémique en date, le
    syndicat CGT des bibliothécaires de la Ville de Paris nous a alertés sur le
    fait que les crédits d’achats de livres seront les mêmes en 2013 qu’en 2012,
    alors que trois nouvelles bibliothèques sont en train de se constituer (Pajol,
    Saint Lazare et Canopée). Lors de la fermeture de la bibliothèque
    jeunesse des Halles, nous avions demandé en vain que les 25 000 documents
    qu’elle possédait soient mis à l’abri en attendant sa réouverture. Seulement
    10 % de ces documents ont (en principe) été préservés, tout le reste étant
    parti à la déchèterie. « On en
    rachètera des neufs »,
    nous répondait-on à l’époque…

    Elisabeth Bourguinat

    Secrétaire d'ACCOMPLIR, membre de "Vivre Paris !"

     

     

  • 300cibles-cea96 Cible de tir croate (Musée de la Chasse et de la Nature) 

                   

    L'arrivée prochaine du printemps correspond aussi à celle de nouvelles expositions dans les musées du Marais ou de ses environs immédiats. Nous en avons sélectionné quelques unes où nous vous conseillons de vous rendre tant par leur originalité que par l'intérêt des pièces exposées.

    Signalons une  très intéressante exposition à l’Hôtel de Soubise (60, rue des Francs Bourgeois, IIIe) intitulée  « Le Pouvoir des actes » qui se tiendra du 27 mars au 24 juin. Seront exposées des « pièces spectaculaires et parlantes …montrant comment l’acte constitue la manifestation par excellence du pouvoir souverain. »   

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    Diplôme de Frédéric II (1234)

     

    Autre thème de visite très surprenant, près de 100 robes issues des collections du Musée Galliera, ainsi que des photographies et des dessins montreront les coulisses des célèbres ateliers de couture parisiens dans la salle Saint-Jean de l’Hôtel de Ville, 5 rue Lobau (IVe). 

    Au Centre Pompidou, une rétrospective très attendue sera consacrée  aux travaux d’Eileen Gray, artiste designer qui a marqué le XXème siècle en matière d’arts décoratifs et d’architecture moderniste. Des peintures, des maquettes, des laques, des décorations intérieures et des photographies seront montrées au public afin de mieux comprendre l’œuvre singulière de cette grande créatrice irlandaise. Au même endroit et aux mêmes dates (du 27février au 3 juin), une dation importante qui enrichit les collections du Musée permettra de voir  20 tableaux signés par le peintre Jesùs Rafael Soto. Inspiré notamment par Mondrian, cet artiste fait partie de ceux qui ont renouvelé en Europe l’art cinétique  (les œuvres comprennent des parties en mouvement). 

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    Fauteuil d'Eileen Gray

    Le musée Cognacq-Jay propose, du  18 avril au 13 juillet,  une exposition temporaire intitulée « Souvenirs du XVIIIème siècle du Sculpteur Jules Dalou ». Ce grand artiste inspiré par le siècle de lumières, ami de Rodin, très mêlé à la Commune, est l’auteur de décorations de l’Hôtel de la Païva sur les Champs Elysées, de nombreux bustes de célébrités  mais aussi de l’ensemble appelé le « Triomphe de la République » au centre de la place de la Nation.

    N’oublions pas non plus, les beaux jours étant de retour, les expositions  en cours qu’il ne faut pas manquer. Celle consacrée aux cibles de tir anciennes souvent peintes par des auteurs anonymes qui se tient au Musée de la Chasse et de la Nature (62, rue des Archives IIIe). Nous vous rappelons enfin l’exposition exceptionnelle qui débute le 27 février  jusqu’au 30 juin, dénommée « La valise mexicaine » où pourront être vus les négatifs retrouvés  de Capa sur la guerre civile espagnole (voir notre article du  20 janvier 2013).

    De bonnes visites en perspective. N’hésitez pas à faire part de  vos commentaires sur le blog.

    Dominique Feutry

     

     

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    Plaque en métal de boîtier électrique ancien pouvant être dangereuse

     

    Récemment un chien est mort électrocuté en marchant sur une plaque en fonte d'un boîtier électrique ancien, dans une rue du XXe arrondissement. La personne qui tentait de le secourir est restée en observation à l’hôpital car elle a reçu, elle aussi, une décharge électrique. Au détour de cet incident qui n’est pas banal et qui aurait pu être bien plus grave encore, la presse s’en est fait d'ailleurs l’écho, nous apprenons que nos rues compteraient encore 3000 de ces vieux modèles de boîtiers électriques datant des années cinquante et même pour certains de la Seconde Guerre Mondiale. Le nombre de 4800 appareils est parfois avancé.

    Nous apprenons aussi que des explosions avec ces modèles de coffrets se sont produites dans un passé récent, elles étaient dues à une oxydation du métal qui aurait généré du gaz à l’intérieur des coffrets…

    Ces boîtiers électriques, le plus souvent en fonte, situés à quelques dizaines de centimètres de profondeur, ont des couvercles qui affleurent à la surface de la chaussée. Ils font la jonction entre le transformateur du quartier et les alimentations d’immeubles. Leur étanchéité s’est érodée et l’humidité pénètre dans l’ensemble. Ils se détériorent, des câbles se dénudent et peuvent alors être en contact avec le boîtier et le mettre sous tension électrique provoquant les événements que nous venons de décrire ou que nous pouvons imaginer. Leur dangerosité potentielle ne peut donc pas être écartée d'autant que métal et eau, particulièrement conducteurs, n’ont jamais fait bon ménage en matière d’électricité. Heureusement les semelles des chaussures des piétons constituent un isolant protecteur, en revanche une main nue, telle la patte du chien, n'est pas protégée.

     

    Boitier éclairage éventré temple 59
    Boîtier électrique en façade, plus récent mais éventré


    Les responsables d’ERDF qui gèrent le réseau de distribution d’électricité en France affirment avec insistance que ces matériels sont entretenus, visités annuellement et qu’ils sont isolés. Leur remplacement serait d'ailleurs progressivement en cours, ce que réfutent certains. Alors qui croire ?

    Bien entendu une enquête est diligentée. Il faut savoir aussi que les nouveaux équipements ont un coffrage plastique et sont accrochés aux façades des immeubles. On ne compte plus ceux qui ont été éventrés et qu'on a sommairement enveloppés de ruban adhésif. Il y a près de deux ans, nous avons exposé aux responsables de la voirie notre préoccupation devant l'état de certains de ces matériels, victime d'un vandalisme criminel.

    Nous ne pouvons que rallier l’avis de ceux qui souhaitent qu’une campagne de sécurisation soit menée à l’aune de cet accident et que les équipements anciens soient changés sans attendre. Perdre son chien est très ennuyant mais nous n’osons pas imaginer ce qui se produirait si un enfant ramassait un objet sur une plaque sous tension ou si une personne appelée à effectuer des travaux entrait en contact avec ce matériel défectueux. La Mairie et la Préfecture de Police attendent les conclusions du rapport sur cet événement. Nous serons très intéressés de connaître les mesures qui seront prises à la suite des conclusions qui seront formulées.

    Dominique Feutry

     

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    PV
    Un agent de surveillance dresse un PV pour stationnement irrégulier (Photo Metro)

     

    Un bilan incomplet puisqu’il ne concerne que les 11 premiers mois de l’année 2012, mais assez exhaustif des contraventions dressées à Paris vient d’être communiqué. Celui-ci amène des commentaires nombreux car la progression est assez significative. Certes le prix des amendes a grimpé en 2011, 17€ contre 11€ faisant croître les encaissements. Cependant l’activité des agents verbalisateurs en 2012 aura sans doute continué à augmenter sur le même rythme qu’en 2011, soit + 7%. Le chiffre record de 3 millions de PV sera vraisemblablement « tangenté » ! Cela représentait en 2011, pour la Ville de Paris qui encaisse 25% des recettes, 63 millions € (+34% par rapport à 2010). 25% vont à la Région et les 50% "restants" au Syndicat des Transports d'Ile de France. On peut s’étonner de tels chiffres.

    Certains disent que les conditions de travail des agents de surveillance  qui établissent l'essentiel des amendes sont de plus en plus difficiles depuis l’arrivée des PV électroniques qui permettent des économies de temps et donc d’en dresser davantage. D’autres mettent en avant la disparition des places de parking en surface (moins un tiers en 10 ans) et la nécessité de tenter de juguler l’indiscipline des conducteurs.

    Sans vouloir faire de Paris et du Marais un espace entièrement piéton, le stationnement sauvage comme le fait de rouler là où c'est interdit constituent les incivilités les plus courantes sujettes à verbalisation. En effet, elles gênent les piétons notamment les personnes qui ont des difficultés pour se déplacer, mais aussi les commerçants, les artisans, les transports en commun… Il est anormal de stationner sur un trottoir, sur un passage clouté, devant un porche, de tordre ou desceller des potelets pour garer son véhicule. Est-il normal de bloquer la circulation dans laquelle se trouvent des livreurs, des transports en commun, des véhicules prioritaires tels que les pompiers ou les ambulances…? N'est-il pas dangereux que des deux roues, motorisés ou non, roulent sur les trottoirs effrayant les passants ou que des automobilistes s'engagent dans les couloirs de bus, alors que c'est interdit ? Combien de fois des places de stationnement réservées aux personnes handicapées sont squattées.

    Verbaliser plus n'est donc pas une action vaine. C'est un une forme de prévention contre les comportements égoïstes et tant mieux si cela rapporte d’autant plus à la Ville, à la Région et au Syndicat des Transports.

    Dominique Feutry