Vivre le Marais, Vivre Paris Centre !

Chronique de la vie au cœur et autour du centre historique de Paris

Catégorie : Histoire

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    Le panneau peint enlevé au 29, rue des Francs Bourgeois (IVe) a laissé place à des inscriptions anciennes

     

    Dans un article daté du 13 avril dernier nous relations l'accident survenu à un magnifique fixé sous verre de la fin du XIXe siècle situé au 29 rue des Francs Bourgeois (IVe) à l'emplacement d'une ancienne boulangerie. Le magasin est exploité sous l'enseigne de prêt à porter Spontini. Mégarde ou vandalisme, il semble difficile de dire ce qui s'est passé réellement. Il n'empêche que ce rare témoin du passé a été très abîmé et il serait dommage qu'il ne soit pas restauré. Mais cela est-il possible vu son état?

     

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    Le panneau en verre peint avant son accident

     

    Il s'avère que cette plaque peinte à l'envers a été enlevée la semaine passée.Et, ô surpise, l'endroit ainsi libéré laisse apparaître des inscriptions plus anciennes de couleur blanche ! Elles ont été executées à même la pierre de la façade badigeonnée en noir pour la circonstance.  Quelles sont ces inscriptions réalisées avant la pose du verre peint datant sans doute du milieu du XIXe siècle ?

    il est ecrit :" Pain pour diabétique. Pain de seigle. Sur commande".

    Ansi le diabète était-il déjà une préoccupation de nos aieux.Quant au pain de seigle moins courant que de nos jours,il fallait le commander.

    Cette découverte, toute relative quelle soit, démontre que parfois des événements désagréables peuvent avoir une suite heureuse. Espérons simplement que cela ne consituera pas néanmoins un argument pour ne pas faire restaurer le verre peint endommagé !

    Dominique Feutry

     

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     Façade de l'Hôtel d'Hozier 110, rue Vieille du Temple (IIIe)

    Un des grands architectes de Louis XIII qui a oeuvré sur plusieurs grands chantiers de cette époque, du Louvre aux Tuileries, en passant par la fameuse digue de La Rochelle, Jean Thiriot, est aussi à l’origine de l’édification de deux hôtels particuliers de la rue Vieille du Temple et quasiment voisins. L’Hôtel d’Hozier et l’Hôtel Mégret de Sérilly.

    Au 110, l’imposant Hôtel d’Hozier qui forme un angle avec la rue Debelleyme a été construit pour un favori d‘Henri III. Il appartint par la suite à un conseiller de Louis XIII, Robert de Marigny, saisi et loué il revint ensuite à la famille Bauyn de Bersan puis à Pierre d’Hozier, juge d’armes (à ne pas confondre avec le grand généalogiste), qui l’occupa durant une grande partie du XVIIIe siècle. Il convient de préciser qu’un juge d’armes, officier du roi, tenait le registre des armes et blasons de quiconque avait le droit d’en porter et réglait les contestations à ce sujet. Pierre d’Hozier et son fils sont à l’origine de la rédaction d’un armorial célèbre qui comportait 10 volumes.

     

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    Hôtel d'Hozier, détail du porhe et des ses portes avec Mars et Minerve

     

    D’un plan assez classique cet édifice comprend un bâtiment central auquel sont accolées deux ailes. Un pavillon relie celles-ci au corps central. Malheureusement les proportions de la façade très stricte se sont trouvées changées à la fin du XIXe siècle du fait d’une surélévation sur 2 niveaux. Le grand portail n’a par contre pas été modifié, les personnages qui y sont joliment sculptés figurent Mars et Minerve. Comme beaucoup d’immeubles il devint aussitôt après la Révolution un atelier. Il a été très bien restauré, et a été inscrit au titre des monuments historiques en 1987 au même titre que la cour, l’escalier d’honneur et sa rampe, ainsi que les caves.

     

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    Hôtel Mégret de Sérilly  106, rue Vieille du Temple (IIIe)

    L’Hôtel Mégret de Sérilly date de 1620, il est situé au N° 106 de la rue. Il a appartenu à Nicolas Malebranche, le secrétaire du Roi, avant de devenir Trésorier général des Fermes de France. Après avoir été la propriété du marquis de Bussière, il passa entre les mains de différentes célébrités littéraires et politiques. Un autre fermier Général l’occupa à partir de 1776, Mégret de Sérilly. Il fut guillotiné 18 ans plus tard du fait de ses fonctions qui étaient alors honnies par la population. Confisqué puis vendu un des propriétaires de l'Hôtel fut Corbeau de Saint Albin, le fondateur du journel "Le Constitutionnel".

     

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    Boudoir de Mme de Sérilly au Victoria and Albert Museum

     

    Le fronton est de forme triangulaire où apparaissent des lions, le porche disposant dans sa clé d’un mascaron représentant une femme avec une couronne de laurier. Un des décors d’une des anciennes pièces de l’Hôtel, le boudoir de Mme Mégret de Sérilly, est aujourd’hui exposé au Victoria and Albert Museum de Londres. Beaucoup de pièces de mobiliers ont en effet pris le chemin de l’Angleterre après la Révolution suite aux ventes aux enchères massives organisées alors, aux pillages et à l‘installation dans ce pays des émigrés fuyant la répression.

    Ces deux Hôtels rénovés sont aujourd’hui privés. Les façades s’offrent à nous, n’hésitons donc pas, lorsque nous nous trouvons devant eux, à les scruter pour mieux admirer tous leurs détails. Peut-être qu’alors une heureuse coïncidence fera que l’un ou l’autre des porches s’ouvrira, permettant de prolonger le regard à l’intérieur ?

    Dominique Feutry

     

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     Façade de l'église Sainte Elisabeth  195 rue du Temple (III°) 

     

    Les églises de Paris alignent souvent sur les murs de leur sacristie car c'était une tradition, les portraits peints des curés qui ont exercé leur ministère dans la paroisse. Certains sont peints par des peintres célèbres et leur portrait est classé, ils ne sont alors pas oubliés par artiste interposé. D'autres sont peints par des peintres inconnus et les prêtres qui n'ont pas laissé d'empreintes visibles, d'écrits remarquables ou de faits illustres sont purement et simplement oubliés.

    Tel aurait pu être considéré le cas du chanoine Albert Marcadé (1866-1951) qui fut curé de l'église Sainte Elisabeth (195, rue du temple IIIe) durant 25 ans, sans que des événements ne bouleversent la fin de son ministère. Fils d’un journalier, le père Marcadé est né le 28 août 1866 à Bordeaux et suit ses études au petit séminaire de la ville. Ordonné prêtre en 1892,  nommé vicaire à Cérons près de Langon, il devient vicaire de Montmartre, puis curé du Bourget.

    Pendant cette période éclate la guerre de 1914-1918, il assume la charge d'aumônier du camp retranché de Paris et des Services de l’Aviation. C'est en décembre 1923, qu'il est nommé curé de Sainte Elisabeth du Temple. Ce  chanoine est très actif durant son ministère puisque la sacristie détruite par les travaux d'Haussmann est reconstruite 78 ans plus tard, le campanile détruit pendant la Terreur est reconstruit selon le plan primitif et un calvaire est installé dans le chevet du chœur.

     

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    Grand orgue de Sainte Elisabeth 

     

    Qu'il s'agisse des Patronages de garçons et de filles, des Troupes de scouts, des Colonies de vacances, de la Conférence de Saint Vincent de Paul, des Dames de Charité, de la Ligue Féminine d’Action Catholique et de l'Institut Dupont des Loges, Albert Marcadé a su mettre en marche, relancer et dynamiser les mouvements, les œuvres et toutes les actions de la paroisse. Il entretient aussi de bonnes relations avec la famille Bouglione allant jusqu'à célébrer la messe sur la piste du cirque d’hiver.

    C'est enfin lui qui réussit à faire reconnaître officiellement, Sainte Elisabeth, comme église conventuelle de l’Ordre de Malte, en 1938. Son goût pour l’Histoire  et l’Art le conduit très tôt à constituer une collection de peintures anciennes, italiennes, flamandes, catalanes, rhénanes, de sculptures, de miniatures, d’ornements liturgiques qu'il expose dans la sacristie de Sainte Elisabeth. Cette collection connue, aujourd’hui, comme la collection Marcadé, se trouve à la Cathédrale de Bordeaux, sa ville natale, et fait régulièrement l’objet d’expositions. Intéressé par l'histoire du quartier, Il publie un revue bimestrielle intitulée "Le Temple".

     

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    Portrait d'Albert Marcadé

     

    Ayant eu une «carrière » réussie, lui le fils d'un simple journalier aurait pu couler des jours relativement paisibles malgré l'entrée en guerre de la France avec l'Allemagne. Il n'hésita pas pourtant à prendre d'énormes risques et faire partie de ces héros de l'ombre venus à l'aide des juifs persécutés par les nazis. Il établit de faux certificats de baptême en découpant les anciens registres paroissiaux, installe  diverses cachettes dans les alentours de l’église pour y loger des familles juives, des prisonniers évadés, participe à l’organisation d’une filière vers Nice.

    En 1943, il n’hésite pas à faire chanter la Marseillaise par les petits chanteurs à la Croix de Bois sur les marches de l’église. Après la guerre, son action courageuse lui vaut la reconnaissance du Grand Rabbin de Paris, Julien Weill, qui s'adressa à lui par ces mots : "Je tiens à vous exprimer, au nom du Consistoire Israélite de Paris, et en mon nom personnel, mes plus vifs remerciements pour les services signalés que vous avez rendus à nos frères persécutés et malheureux….et l’hommage de mes très respectueuses et religieuses sympathies".

    Le chanoine Marcadé sauva de nombreux juifs pendant la guerre et il devrait à ce titre figurer sur le mur des Justes. Nous disposons de témoignages mais il nous en faudrait davantage pour mener à bien une telle requête. Il a été élevé au grade de Chevalier de la Légion d'Honneur en 1947, année où il acquit l'orgue de chœur et trouva les fonds pour faire restaurer les grandes orgues.

    Âgé, le curé demanda lui-même d'être relevé de sa charge et démissionna. Sa lettre d'adieu à ses paroissiens se termine ainsi : "Que cette paroisse devienne plus prospère en biens spirituels et temporels !" Plus de 60 ans après sa mort des personnes œuvrent pour que ne soit pas oubliée la mémoire de ce curé exceptionnel qui a redonné tout son lustre à l'église Sainte Élisabeth et, à sa manière, a résisté de façon héroïque, au péril de sa vie, face à l'occupant nazi, en sauvant de nombreux juifs.

    Dominique Sabourdin-Perrin

     

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    Façade sur rue de l'Hôtel d'Alméras appelé aussi Jean de Fourcy 30, rue des Francs Bourgeois (IIIe)

     

    Le N° 30 de la rue des Francs Bourgeois (IIIe) est l’adresse d’un très bel hôtel particulier que peu de passants, nombreux à cet endroit, prennent la peine de regarder en détail. Pourtant le bâtiment qui se trouve à cet endroit a été construit en 1583 pour Jean de Fourcy trésorier du Roi par le plus grand architecte de l’époque, l’architecte du roi Louis Métezeau (1560- 1615) qui nous a laissé entre autres, la Grande Galerie du Louvre, la conception de la place des Vosges et le collège des jésuites devenu le Prytanée national militaire de La Flèche. Cette magnifique construction a été vendue ensuite en 1611 à Pierre d'Alméras secrétaire et conseiller d’Henri IV.

    Hotel_d_almeiras_porteLe portail surmonté de sa niche encadrée de deux lucarnes en zinc

     

    Composé de pierres et de briques ce rare exemple d’hôtel particulier de cette époque est resté quasiment intact, si ce n’est l’ajout de deux éléments de grande qualité par ses occupants successifs, ce dont nous ne nous plaignons pas. Il s’agit d'une part du grand escalier intérieur qui fut réalisé en 1655 à la demande du nouveau propriétaire, Louis Bertauld receveur des consignations de la Cour des Aides (correspondant aux services de la Direction des Impôts traitant des contentieux fiscaux) et d'autre part de la porte cochère. Cette dernière date de 1723, elle répondit au souhait du nouveau propriétaire, Robert Langlois de la Fortelle président de la Chambre des Comptes de Paris qui acheta l’Hôtel en 1719, d'agrémenter le bâtiment .

    La façade sur rue est de belle dimension et plutôt longue. Le rez-de-chaussée est en pierre et l’entresol en brique. Le portail, extrêmement riche, présente des « rayons de pierre » (les claveaux) qui chapeautent le fronton surplombé par une niche de belle proportion. De jolies lucarnes en zinc travaillées agrémentent le toit. La porte est massive mais élégante de par son style régence, des animaux fantastiques sculptés ornent le haut des vantaux.

     

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    La cour de l'hôtel Poussepin, tout proche au n° 34, en 1901 (photo sur papier albuminé BNF)

     

    Résidence privée, cet ensemble ne se visite pas. Tout juste est-il possible de distinguer des bâtiments intérieurs plus hauts que celui sur rue, avec des briques disposées en motifs étudiés.

    Après la Révolution, cour et jardin sont occupés, comme souvent dans le quartier, par des constructions parasites qui ont disparu de même que les deux commerces de chaque côté du porche que l'on peut voir sur des photos anciennes. Notons que Barras y habita de 1814 à 1815.

    L’ensemble classé depuis 1978 comporte la façade, la toiture, l’escalier d’honneur et sa rampe, plusieurs pièces dont le salon et ce qui est peu commun, les lieux à l’anglaise avec des boiseries situés au 1er étage.

    Dominique Feutry

     

  • Cimetière picpus Entrée du cimetière de Picpus

     

    L'enclos de Picpus et la place de la Nation

    Les mémoires de la Révolution


    Jeudi 16 mai 2013

    rendez-vous à la sortie du métro Nation (sortie
    Faidherbe-Chaligny)

    à  14h15

    Au milieu d’un
    charmant jardin dont les fleurs seront écloses, notre guide, Sylvain Solustri,
    nous fera revivre les heures sombres de la Révolution. Unique
    nécropole privée de la capitale, l’Enclos de Picpus fera renaître les souvenirs
    de la Terreur
    et des guillotinés de la « Place du Trône Renversé » (aujourd'hui « Place
    de la Nation
    »). Nous situerons l'emplacement précis de la sinistre machine du docteur
    Guillotin, dressée à l'ombre des colonnes symboliques de la Barrière du Trône.

    Nous parcourrons le
    chemin exact, reconstitué par le conférencier, des tombereaux ensanglantés
    jusqu'à leur dernière demeure : le couvent des Dames Chanoinesses. Nous
    verrons les fosses communes et le cimetière attenant, véritable « gotha
    funéraire » de la noblesse de France, avec la tombe du général La Fayette où flotte le
    drapeau américain. Pour finir, nous retournerons place de la Nation pour y déchiffrer le
    symbolisme très fort du groupe statuaire de Dalou au milieu de la place. Une
    découverte de lieux historiques peu connus du vieux Paris.

    Merci de prévenir
    de votre venue et du nombre de personnes qui vous accompagneront
    Marie-Françoise Masféty-Klein par mail mfmk@free.fr ou par téléphone 01 42 72
    61 41. Merci de préparer une participation exceptionnelle de 15 euros par
    personne compte tenu du droit d’entrée que nous prendrons en charge. Parlez-en
    à vos amis qui peuvent être intéressés. Nous vous attendons nombreux pour cette
    visite et vous adressons nos fidèles amitiés.

     

  • Caves-paris
    Exemples de caves médiévales  

     

    L’association Historique du Temple de Paris dont le siège est 40 rue des Blancs Manteaux (IVe) lance un programme de recherches sur les caves anciennes de Paris. Si l'on se réfère en effet au Paris médiéval, nous avons le réflexe de nous tourner vers les églises, les abbayes et l'architecture militaire sans imaginer que des témoignages plus modestes subsistent et en particulier les caves.

    En partage avec différents acteurs de la recherche du patrimoine, des institutionnels et des associations, toute une équipe se lance dans cette aventure de recensement. Les caves bien que transformées l'ont été beaucoup moins que les habitations extérieures et constituent de ce fait un terrain de recherche et d'étude très important. Elles renseignent sur les « rythmes imprimés au développement de la ville ». Elles ont souvent servi à stocker les marchandises notamment le long de la Seine, lieu de débarquement. Il s'agit de faire de l'archéologie au sens propre. Des analyses seront faites à la recherche par exemple de production artisanale qui aurait été développée dans ces lieux.Des caves gallo romaines existent, d'autres sont à plusieurs niveaux ou disposent de puits et communiquent entre elles afin de fuir en cas de besoin.

    Les travaux donneront une idée de cette richesse enfouie et alimenteront une base de données des découvertes constatées, à l'image des caves de l'Hôtel de Clisson récemment « mises au jour ». L'association du Temple de Paris nous demande d'informer nos lecteurs qui auraient observé ce type d'architecture médiévale dans leur immeuble ou chez des proches de contribuer au développement de cette étude et de prendre contact avec l'équipe de chercheurs à l'aide du bulletin en bas de page à l'adresse suivante :http://www.templedeparis.fr/caves-de-paris/  ou par téléphone (01 30 70 00 52) ou par mail :cavesmedievales@templedeparis.fr

    Peut-être que des trésors méconnus de l'architecture civile pourront grâce à votre collaboration être ainsi répertoriés ?

    Dominique Feutry

     

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    La fontaine de Joyeuse (IVe)

     

    La rue de Turenne présente la particularité d'être bornée de deux magnifiques fontaines. La fontaine Boucherat sur sa partie nord (place Olympe de Gouge (1748-1793) considérée comme la pionnière des féministes) et la fontaine de Joyeuse (face à la rue des Minimes et du Foin) à son extrémité sud. L'une date du XVIIe siècle et l'autre du XIXe.

    La première fontaine de Joyeuse fut édifiée en 1580 contre l'Hôtel Miron qui deviendra ensuite l'Hôtel de Joyeuse. Elle a été remplacée par une autre en 1687 et enfin par celle que nous pouvons admirer aujourd'hui. Elle date de 1847 et s'est insérée dans un vaste programme d'installation de fontaines publiques voulue alors par la Ville de Paris qui souhaitait mieux alimenter en eau la population parisienne qui augmentait. La fontaine de Joyeuse a été est décorée par le sculpteur Isidore Romain Boitel (1812-1860) qui fut élève de David d'Angers dont les œuvres à la suite de commandes publiques sont rares .

    La fontaine a trois mètres de large et s'insère dans une arcade ouverte (où figurent sur le fronton les armoiries de la Ville de Paris) avec une niche en cul-de-four (c'est-à-dire une voûte en quart de sphère). Sur un piédestal en marbre, une petite statue en fonte d'enfant tient une jarre inclinée d'où jaillit l'eau. Sur la base est inscrit « OURCQ » du nom du canal qui l'alimente. Au-dessous, un bassin semi-circulaire supportant une vasque en forme de coquille reçoit l'eau de la jarre. Il est intéressant d'examiner la sculpture en bas relief du cul du four qui représente des roseaux et différents animaux aquatiques parmi lesquels se trouvent héron, grenouille, cygne et serpent.

     

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    La fontaine de Joyeuse (IVe) autrefois sans sa grille

     

    L'ensemble est magnifiquement réalisé, il met en valeur l'eau accentuée par le bruit de sa chute qu'amplifie, à l'image d'une caisse de résonance, la cavité dans laquelle elle se trouve. Une façon aussi de mettre en valeur pour les habitants, la générosité des édiles de l'époque. La fontaine restaurée en 2008 est protégée par une grille.

    La fontaine Boucherat est située au croisement des rues de Turenne et Charlot. Elle est beaucoup plus sobre que la précédente malgré son importance. Elle fut bâtie en 1697 par Jean Beausire. Ce Contrôleur des Bâtiments de la Ville de Paris sous Louis XIV, outre le privilège d'avoir 19 enfants dont nombre d'entre eux devinrent architectes, travailla à l'aménagement de la place des Victoires et de la place Vendôme. Il est surtout connu pour la construction de 21 fontaines dans Paris dans le cadre d'un plan destiné à améliorer l'approvisionnement en eau de la Ville. 11 d'entre elles subsistent encore aujourd'hui. La fontaine accolée au N°133 de la rue de Turenne doit son nom à Louis Boucherat (1616-1699), Chancelier de France qui était aussi le nom d'une partie de la rue de Turenne actuelle où elle est située.

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    La fontaine Boucherat (IIIe)

     

    La façade de la fontaine est deux fois plus haute que sa largeur. En léger retrait, une sorte de niche à peine soulignée encadrée de refends donne une majesté à l'ensemble qui est surmonté d'un fronton triangulaire dans lequel se trouvaient les armes de la Ville. Au-dessus du mascaron finement sculpté figure une inscription en latin : « De même que l'heureuse paix conclue par le Roi Louis répandra l'abondance  dans la ville de Paris, cette fontaine lui donnera ses eaux » La paix en question est celle signée en 1697 par Louis XIV à Ryswyck aux Pays Bas qui mit fin à la guerre de la Ligue d' Augsbourg et permit notamment à la France d'annexer une grande partie de l'Alsace.

    La fontaine a été classée en 1925 et restaurée en 1993. L'eau qui autrefois provenait de la pompe à feu de Chaillot sort de la gueule d'un lion à l'aide d'un bouton poussoir.

    Ces deux sites sont intéressants, caractéristiques de leur époque et méritent vraiment un détour au hasard d'une promenade.

    Dominique Feutry

     

  • Arbalétriers rive 56-58 vieille du TemplePassage historique des Arbalétriers (IIIe). Vue de la rive Ouest, insultée et défigurée par des tags

     

    C'est un "jour de colère" pour une riveraine du passage des Arbalétriers, voie privée mais ouverte au public, et un appel au secours qu'elle nous envoie :

    "Vous ne seres pas étonnés de savoir que je partage entièrement votre avis sur le passage des Arbalétriers, car ce que vous voyez sur cette photo est aussi…….ma cuisine ! Nous avons récemment acheté cet appartement par amour du Marais et j'ai le coeur brisé de voir cet encorbellement saccagé de la sorte.

    Aujourd'hui encore j'ai stoppé un camion énorme qui tentait de se garer dans le passage en menaçant de briser les encorbellements. Maintenent il y a deux camions garés qui cognent les structures. Je suis impuissante devant ce désastre. Dites moi ce que je peux faire pour m'aider car il faut faire quelque chose. Nous devons protéger ce passage historique des tagueurs et des camions".

     

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    C'est nous qui poussions un cri d'alarme en juilet 2010 pour demander aux propriétaires des immeubles de la rive Ouest (56-58 rue Vieille du Temple) de mettre de l'ordre dans ce décor indigne de l'importance historique (*) du lieu et de l'intérêt architectural de constructions qui remontent au moyen âge ; notamment cette pièce en encorbellement qui, sa propriétaire nous l'apprend, abrite aujourd'hui sa cuisine !

    C'est d'autant plus regrettable que la rive Est est minutieusement entretenue et préservée par les propriétaires du 34 rue des Francs-Bourgeois et, parmi eux, le Centre Culturel Suisse.

    Arbalétriers rénovéLa rive Est (vertueuse) du passage

    Cette dame qui nous interpelle nous demande de l'aide. Le meilleur conseil que nous puissions lui donner est de porter le sujet devant son conseil syndical et devant l'assemblée générale des copropriétaires. Et sachant que le Maire du IIIe, Pierre Aidenbaum, nous lit et que l'Architecte des Bâtiments de France doit avoir des hauts-le-coeur en passant par là, nous les invitons à joindre leurs efforts pour que (1) une injonction de ravalement soit adressée aux copropriétaires et (2) il leur soit vivement recommandé de réglementer la circulation et de fermer la grille d'accès le soir. D'autres lieux similaires ont connu la même fortune (passage Ste Avoye, impasse de l'hôtel d'Argenson …), ils sont arrivés à cette conclusion et ils s'en réjouissent.

    Gérard Simonet

     

    (*) Ce passage était au XVème siécle un cheminement de l'hôtel Barbette, résidence secondaire de la reine Isabeau de Bavière, en dehors des limites de Paris, vers l'hôtel St Paul où résidait son époux le roi Charles VI, à travers une poterne de l'enceinte Philippe Auguste. C'est là, selon certains, que fut massacré le duc d'Orléans en 1407, victime des sbires de son cousin Jean sans Peur, duc de Bourgogne.

     

     

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    Porche d'entrée de la Bibiothéque Historique de la Ville de Paris rue Pavée (IVe) 

    Qui imagine en passant rue des Archives, au 24 rue Pavée, qu’il se trouve devant le lieu même où fut ouverte la première bibliothèque publique de la Ville de Paris, il y aura très bientôt 250 ans, le 13 avril 1763, date de son inauguration ? Cette institution a connu bien des vicissitudes mais elle a, malgré des déplacements au cours de sa longue histoire, miraculeusement retrouvé depuis bientôt 45 ans, son emplacement d’origine. La bibliothèque est installée dans un bâtiment historique, l’Hôtel Lamoignon que certains appellent d’Angoulême Lamoignon du nom de ses illustres occupants. Construit à la fin du XVIe siècle dans le style renaissance pour la fille naturelle d’Henri II, Diane de France, la bâtisse revient à son neveu Charles d’Angoulême, fils de Charles IX. A sa disparition en 1650, des locataires s’installent dans les lieux, notamment Guillaume de Lamoignon premier président du Parlement de Paris, la famille Lamoignon en deviendra ensuite propriétaire et entreprend des aménagements réalisés par le célèbre Robert de Cotte. On peut admirer les sculptures d’enfants nus au-dessus du portail construit au début du XVIIIe, l’échauguette à trois trompes XVIIe qui donne sur la rue des Francs Bourgeois et dont on retrouve une réplique plus simple dans la cour de l’Hôtel de Mayenne (cf notre article du 16 septembre 2012). Signalons au deuxième étage un salon orné de lambris à pilastres dans le style corinthien. Une salle au rez- de- chaussée est décorée d’un plafond à poutres peintes de flèches et de carquois. Les statues de Diane de France (1621) et Charles d’Angoulême 1681) sont exposées dans un pavillon de la cour. Elles étaient avant sa destruction à la Révolution dans l’ancienne église des Minimes de la place Royale. Tout cet ensemble est classé depuis 1937.

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    Façade de l'Hôtel d'Angoulême Lamoignon

    L’Hôtel fut un lieu de rassemblement et d’échanges d’idées des meilleurs esprits de l’époque, Bourdaloue, le confesseur de Louis XIV, ou Madame de Sévigné qui venait en voisine, ainsi que Racine sont les plus souvent cités. Lorsque les Lamoignon quittèrent le quartier devenu moins en vogue, un certain Antoine Moriau procureur du Roi et de la Ville de Paris loua l’ensemble pour y installer sa bibliothèque qu’il légua alors à la ville qui l’ouvrit ensuite au public. Peu après la Révolution, la bibliothèque est intégrée à celle de l’Institut. Après divers transferts, les collections intègrent l’Hôtel de ville où elles brûleront avec lui lors de la Commune en 1871. Durant cette période, l’Hôtel appartint à divers propriétaires qui le louèrent. C’est ainsi qu’Alphonse Daudet y résida et tenait salon, les dîners où étaient invités Flaubert ou Tourgueniev ont été décrits par son fils Léon Daudet qui naquit à cet endroit. L’ensemble fut finalement racheté par la Ville de Paris en 1928 et après d’importantes restaurations la bibliothèque actuelle y fut installée en 1968 ! Grâce à différents dons dont celle du bibliothécaire Jules Cousin, cette bibliothèque publique spécialisée sur l’Histoire de Paris est riche de 2 millions de documents.

     

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    L'échauguette à trois trompes (XVIIe)

    Elle est le pendant du musée Carnavalet où se trouvent les collections historiques de la ville de Paris. L’Hôtel de Lamoignon est richement doté, il détient 300 000 volumes dont certains du XVe siècle, 15 000 plans dont les plus anciens sont du XVIe, 500 000 photographies, 20 000 manuscrits dont certains du Moyen Age, un fonds important d’affiches dont certaines concernent la Révolution et des collections théâtrales. Les provenances de toutes ces richesses proviennent de grands noms, Georges Sand, Voltaire, Jules Michelet, Cocteau mais aussi les Fréres Jacques, France-soir, ou Jacques Hébertot qui a laissé son nom à un célèbre théâtre. Notons que le Bibliothéque participe à l'action de la Commission des Travaux Historiques de la Ville de Paris qui comptent depuis sa réinstallation en 1983 une quarantaine de volumes. Les inscriptions sont gratuites et valables pour toutes les bibliothèques de la Ville de Paris. Des visites, des conférences, des expositions sont organisées périodiquement. Il suffit de consulter le site pour trouver les informations correspondantes.

    Dominique Feutry

     

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    La synagogue du 21 bis, rue des Tournelles IVe

     

    C’est en 1872 que débutent les travaux de construction de la synagogue de la rue des Tournelles (IVe) au N° 21 bis. Ils s’achèveront 4 ans plus tard et la consécration aura lieu le 15 septembre 1876. Ce projet né en 1865, suite à une délibération du Conseil Municipal de Paris, répondait d’abord au souhait exprimé par Napoléon III de mieux intégrer les juifs à la Nation mais aussi au besoin de donner des lieux de culte (la Grande synagogue de la rue des Victoires IXe et celle de la rue des Tournelles ont été construites en même temps) aux nombreux « émigrés » juifs installés dans le Marais puis ceux venus de l’Alsace- Lorraine passée sous le joug prussien. Plus tard ce lieu sera aussi celui des émigrés de la communauté ashkénaze arrivés de différents pays d’Europe Centrale, de Pologne et de Russie.

    Le bâtiment est souvent qualifié de style « romano-byzantin », mais surtout il a été conçu comme s'il s'agissait d'une église. En effet, l’architecte retenu, Marcellin-Emmanuel Varcollier, un ancien élève de Baltard qui a construit la Mairie du XVIIIe, n’avait jamais édifié de synagogue avant celle-ci. Il n’a pas donc pas hésité à installer à l’intérieur de l’édifice deux éléments anachroniques dans une synagogue, une chaire et un orgue ! Il prit d’emblée le parti d’utiliser le fer très en vogue à l’époque comme élément du décor architectural, ce qui donne une allure très élancée à l’espace. Les matériaux ont été produits par les Ateliers de Normandie qui étaient en relation avec Gustave Eiffel.

    La façade principale située rue des Tournelles (car il existait une entrée 14 place des Vosges) est assez imposante car il s’agit de la deuxième plus grande synagogue de Paris avec plus de 1300 places, longue de 50 m et large de plus de 20 m. Elle comprend une partie centrale et deux côtés formant pendant. Elle est ornée d’une rosace et de 3 fenêtres entre lesquelles sont sculptées les armes de Paris, les rouleaux de la Loi et un texte en hébreu tiré des psaumes qui commence par « Ouvre moi les portes du salut….».

     

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    Intérieur de la synagogue et la struture en métal

     

    Après avoir franchi un péristyle, nous nous trouvons dans la nef qui se termine par une seconde nef semi circulaire. Des poutrelles et arcades ouvragées de métal reposent sur des piliers de chaque côté formant des tribunes sur deux étages. L’ensemble est très harmonieux, bien proportionné et agréable à l’œil. Il faut aussi souligner que l’édifice tourne le dos à Jérusalem, une façon de monter que l’on entre dans la Nation française et que l’on quitte la Nation juive.
    Le bâtiment a été endommagé lors de l’affaire Dreyfus à la fin du XIXe siècle. Réservé à la communauté ashkénaze décimée lors de la guerre, la synagogue de la rue des Tournelles accueille aujourd’hui les séfarades, les ashkénazes pratiquant leur culte de l’autre côté qui lui est accolé, place des Vosges.

    Le monument a été classé en 1987, il est un témoin très intéressant de l’architecture du XIXe siècle et de la volonté politique du Second Empire et de la IIIe République naissante
    de donner en France toute sa place au judaïsme.

    Dominique Feutry