Vivre le Marais, Vivre Paris Centre !

Chronique de la vie au cœur et autour du centre historique de Paris

Catégorie : Urbanisme, PSMV

  • Francs bougeois 39 sté des cendres hall
cheminée


    Le hall principal et la cheminée monumentale, 39 rue des Francs-Bourgeois (IVe)

                                                                                                                

    Dans un article daté du 14 avril 2009 sur ce blog, nous annoncions le départ de la Société des Cendres de son siège historique du 39 rue des Francs-Bourgeois. On en sait un peu plus aujourd'hui des intentions des propriétaires, la holding SOFIMAR (Société Financière du Marais), actionnaire majoritaire de la Société des Cendres.

    Une déclaration préalable de travaux a été déposée auprès de la direction de l'urbanisme de la Mairie de Paris pour le "réaménagement d'un bâtiment de deux étages à usage d'atelier, avec réouverture d'une cour et modification partielle des façades sur cour et sur rue …."

    Cette information liminaire prend forme quand on visite les lieux, ce que nous venons de faire. On découvre d'abord une cour encombrée de verrières. Les travaux prévoient de lui rendre ses proportions originelles, dans la ligne du PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) du Marais.

    On débouche ensuite dans le hall sous ferme métallique, qui constituait l'atelier principal de la fonderie. Car c'est bien d'une fonderie qu'il s'agissait. Les bijoutiers-joailliers lui confiaient ses déchets. Ils étaient broyés puis fondus pour récupérer l'or ou l'argent résiduels qu'ils contenaient encore.

    Francs bougeois 39 sté des cendres presse 

    Presse géante à double meule en fonte, installée en sous-sol.

                                                                                                               

    La cheminée en briques, visible du jardin public de la Maison de l'Europe, ne fait pas moins de 35 mètres de haut. Elle trône sur un four principal qui fait partie intégrante du bâtiment. D'autres fours de capacité plus modestes sont visibles à l'intérieur sur la partie latérale du bâtiment.

    Le projet des propriétaires est de mettre en valeur ce site en conservant la mémoire industrielle d'une activité pratiquement disparue de nos jours (il reste encore un petit atelier rue des Haudriettes dans le IIIe). Les constructions parasites doivent disparaître pour laisser place nette à la structure principale. La cheminée, les fours, les machines (presses) et naturellement le bâti du XIXe qui donne sur la rue seront traités et mis en valeur.

    Francs bougeois 39 sté des cendres propriét
    Francs bougeois 39 sté des cendres escalier

                                       

    Le pétitionnaire, Jean-Cyrille Boutmy, Président de la SOFIMAR, devant le grand four. Derrière la cheminée, cet escalier qui donne accès aux sous-sols, est taillé dans la muraille de Philippe Auguste.

                                                                                                                                               

    On ignore encore l'affectation ultérieure du site. Hall d'exposition, musée, salle de sports, pépinière d'entreprises, école ? Nous souhaitons bon vent au projet, pourvu qu'on nous conserve la façade et que l'activité résultante ne vienne pas perturber un équilibre urbain déjà bien affecté par la fréquentation excessive des week-ends et la mono activité du prêt à porter.

           

          Francs bourgeois 39 sté des cendres
façade

    Façade sur rue

             

  • Temple 51

    Hôtel de Largillierre, 51 rue du Temple et 6 rue Simon Le Franc (IVe)

                                                                                                                                                                 

    Cet ensemble immobilier vide, qui hébergeait jusqu'à un passé récent des entreprises et la direction de l'environnement de la Mairie de Paris au rez-de-chaussée, va être rendu à l'habitation.

    Le bâtiment date de la fin du XVIIème siècle. Le peintre Nicolas de Largillierre y vécut à partir de 1689. Sa façade seulement présente un réel intérêt architectural. Elle se distingue par la présence d'un premier étage noble sur entresol avec de très grandes hauteurs sous plafond et un porche central qui englobe l'entresol. La cour pavée intérieure sera conservée mais les corps de logis, qui s'étendent sur le 6 rue Simon Le Franc, sont assez dégradés et ont subi des ajouts comme cet escalier extérieur à vis métallique soutenu par des IPN inesthétiques. Une sérieuse réhabilitation s'impose.

    Temple 51 escalier métallique à vis Le maitre d'ouvrage est la société MARAIS FONCIER S.A.S. qui a déjà à son actif de nombreuses réalisations dans le Marais.

    31 logements sont créés avec maintien d'une surface commerciale au rez-de-chaussée. Un quart de la surface, en accord avec la Mairie de Paris, est acquis par BATIGERE Île-de-France, qui administre 63.000 logements sur toute la France. Elle a bénéficié d'un prix préférentiel compatible avec la location à loyers modérés. Les autres logements subissent le contre coup de la péréquation mais ont déjà trouvé acquéreurs, au prix de 12.000 €/m².

                                                                                                                                                              

  •    Temple vue générale enclos

    L'enclos du Temple vers 1450. L'église au centre est gardée par la "tour de César" et par le donjon, au fond à droite, avec ses quatre tours, flanqué d'une cinquième plus petite. Il trônait à l'extrémité ouest de l'enclos qui renfermait, en outre, les bâtiments nécessaires à la vie monastique, des habitations réservées aux laïcs au service de l'Ordre et quelques jardins appelés "coutures". L'ensemble était ceinturé d'une muraille qui lui donnait l'aspect d'une ville fortifiée (bibl. Histoire du IIIe, Editions Hervas, par Philippe Sorel).


    C'est dans une tour du donjon du Temple qu'a été emprisonnée la famille royale de Louis XVI, à la révolution. Le jeune roi Louis XVII  y est mort victime d'un traitement indigne et Napoléon le fit détruire pierre par pierre en 1806 car il était devenu un lieu symbole pour les monarchistes, qui faisait de l'ombre à l'Empire.

    Il n'en reste donc plus rien, si ce n'est un marquage dérisoire des tours à la peinture bleue, devant la mairie du IIIe, dont l'emplacement actuel correspond à peu près au donjon.

    Plus rien ? Pas tout à fait.

    Voici ce que nous écrivions en date du 2 février 2009 :

    "Au 73 de la rue Charlot (IIIe), où on est toujours dans le périmètre du secteur sauvegardé du Marais (PSMV), se trouve un immeuble étroit de trois étages plus un étage sous combles, qui affiche sur sa porte d'entrée une autorisation caduque de démolir/construire, que le temps et les barbouillages des tagueurs ont rendu illisible.

    Quand on pénètre, on découvre un espace qui va en s'évasant sur un ensemble de petits immeubles en déshérence totale. Les sols sont défoncés ; les bâtiments délabrés et abandonnés semblent tout droit sortis d'un bombardement.

    Si on se faufile – à ses risques et périls – dans un passage étroit sur la gauche, on découvre une tour ancienne en pierre (photos 4b) qui s'appuie sur un mur de même facture. La tour fait cinq mètres de diamètre pour dix mètres environ de hauteur.

    Il s'agit des derniers vestiges de l'enclos du Temple. La muraille et sa tour de garde sont une portion de l'enceinte. On voit sur la photo les constructions parasites qui s'y sont greffées, telles ce petit cabinet qu'on a inséré sur la droite.

        Tour enclos temple vue du bas 4b

    Le PSMV stipule que les bâtiments doivent être conservés, de même que les cours pavées. Il y a des années que cet ensemble immobilier souffre de la mésentente de ses propriétaires sur les travaux à faire. Il y a pourtant vingt cinq appartements en jeu qui pourraient retrouver leur usage naturel si un projet de rénovation, privé ou municipal, voyait le jour.

    C'est un des paradoxes du Marais : l'immobilier est cher mais on manque d'investisseurs décidés à le mettre en valeur et à l'exploiter.

    Au moment où certains proposent de bâtir des tours dans nos quartiers ou de surélever les immeubles existants, revenons sur terre en rappelant que plus de cent logements sont gelés au profit de  marchandises entreposées et que des opportunités de réhabilitation d'immeubles délaissés existent. Au 73 rue Charlot, de surcroît, mettre en valeur ce vestige exceptionnel permettrait de conserver la mémoire d'un site disparu qui a été l'un des plus remarquables de Paris."

                                                                                                                

    Nous sommes revenus sur les lieux. Les investisseurs se sont mis d'accord. L'ensemble immobilier, façade, passages, cours intérieures, et bâtiments achève sa rénovation. Une vingtaine de logements sont recréés, presque tous vendus.

    Charlot 73 chantier 06 05 10

    La tour et quelques pierres et poutres et solives d'origine, restent visibles derrière une cloison métallique vitrée. Les copropriétaires sont conscients du vestige remarquable qu'ils détiennent. Ils se disent prêts à en ouvrir l'accès à l'occasion d'évènements exceptionnels, comme les journées du patrimoine. Voici ce qu'on pourra voir :

    Charlot 73 tour enclos temple 06 05 10 

    Tour de l'enclos du Temple, 73 rue Charlot (IIIe)

                                                                                                                                                   


  • Imiza chapelle cap corse avril 2010Imiza, Canari, chapelle Ste Catherine, côte occidentale du Cap Corse, site inscrit au titre de la loi de 1930

     

    Les députés ont voté le 6 mai 2010 la suppression de "l'avis conforme" des Architectes des Bâtiments de France (ABF) sur les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP), dans le cadre du Grenelle 2.

    Les maires depuis longtemps revendiquent le droit absolu d'accorder ou non les permis de construire. Les associations de défense du patrimoine et, dans une certaine mesure, l'Etat, dans l'exercice de son pouvoir régalien, ne voulaient pas donner libre cours à des intérêts locaux qui ne sont pas toujours respectueux du patrimoine national.

    Le texte voté, finalement, pourrait constituer un compromis acceptable : l'ABF doit se contenter d'un "avis simple" mais en cas de désaccord avec le maire, le Préfet de région, représentant de l'Etat, est appelé à trancher.

    Cette disposition ne concerne que les ZPPAUP, qui deviennent des "aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine". Les "sites inscrits" au titre de la loi de 1930 et, a fortiori, les "secteurs sauvegardés" comme le Marais ne sont pas visés. La chapelle Ste Catherine peut dormir tranquille.

    Il reste que cette décision ébranle sur ses bases l'autorité du Ministère de la Culture et ses ABF. Ces "empêcheurs de construire en rond" en ont agacé plus d'un mais combien de massacres ont-ils évité ? Dans notre pays où le patrimoine est un atout majeur, non délocalisable et source de qualité de vie, ce n'est pas le moindre des résultats à mettre à leur actif.

      

  • Gravilliers 78

    Immeuble de quatre étages, 78 rue des Gravilliers (IIIe)

                                                                                                                                        

    Faute de recul pour la prise de vue, on ne voit que les deux premiers étages et le rez-de-chaussée. S'agit-il du Marais ? Non, car on se trouve au-delà de la rue Beaubourg, limite ouest du PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur). L'avis conforme de l'Architecte des Bâtiments de France n'est pas requis. Pourquoi alors, et à quel titre, la réhabilitation de cet immeuble – qui ne fait pas rêver – a-t-elle été soumise à l'approbation de la "Commission du Vieux Paris" qui siégeait le 1er avril ?

    La réponse est liée au PLU (plan local d'urbanisme) de Paris qui a été voté pendant la précédente mandature. Il prévoyait la protection de 6.000 immeubles environ, hors PSMV du VIIe et du Marais, qualifiés pour leur valeur architecturale ou pour la mémoire qu'ils véhiculent. Leur sélection, qui a été faite, beaucoup en conviennent, avec vitesse et précipitation, n'est pas exempte de critiques.

    Ceci étant, cette protection a désormais le mérite d'exister. Elle diffère par bien des aspect du régime propre aux PSMVs (une centaine en France). En particulier, elle vise des bâtiments quand le PSMV couvre un secteur et elle ne protège pas les intérieurs.

    Son bras armé est la "Commission du Vieux Paris", qui dépend de l'Adjointe au Maire de Paris, Danièle Pourtaud, en charge du patrimoine. La commission siège tous les mois et se penche sur des projets d'urbanisme qui soulèvent des interrogations de nature patrimoniale.

    Dans le cas présent d'un immeuble visiblement abandonné mais inscrit sur la liste des bâtiments "protection Ville de Paris" et qui attend sa réhabilitation, elle s'est prononcée pour "la conservation de l'escalier existant" et s'est "opposée à la démolition des planchers d'origine".

    Il y a souvent, il est vrai, dans ce genre d'immeubles XVIIIe siècle, de jolis escaliers et des rampes qui ne demandent qu'à être rénovés et de belles poutres et solives qui en font le charme.

    Les résolutions de la commission ne sont pas exécutoires, à l'inverse de celles des Architectes des Bâtiments de France, mais il est courant que le Maire de Paris les valide et en fasse la condition d'attribution d'un permis de démolir et de construire.

    Une exception notoire est celle qui a visé l'hôtel de Mayenne, 21 rue St Antoine (IVe), où les conclusions de la commission du Vieux Paris ont été ignorées.

                                                                                                                                                 

  • Place de france 

    La Place de France, gravure d'après Châtillon, musée Carnavalet

    Place de france plan (2)  

    Plan du Haut-Marais, aujourd'hui (IIIe). (orienté nord à droite)

       

    Ces deux illustrations se superposent exactement. Au carrefour des rues de Turenne et Vieille du Temple, correspond le centre du demi-cercle sur lequel s'organisait le projet d'une "place de France". La porte monumentale est en retrait, d'une distance qui équivaut approximativement à la hauteur du trapèze des rues de Turenne, St Claude, et des Filles du Calvaire.

    Revenons en 1608. Henry IV, le roi bâtisseur, avec l'aide de son ministre Sully, s'est déjà illustré avec la place Dauphine, le Pont-Neuf, d'une facture originale pour l'époque, en pierres (et pas en bois), sans aucune maison sur ses flancs, et la place Royale, devenue depuis place des Vosges.

    Il forme alors le projet d'étendre la capitale au nord-est et d'en assurer le peuplement en urbanisant les marais et jardins qui s'étendent devant l'enclos du Temple. Ce sera la place de France. Elle s'appuyait sur une muraille qui suivait à l'est le tracé des remparts (boulevard des Filles du Calvaire) et s'ouvrait par une porte monumentale sur le centre d'un éventail formé par les rues de Normandie, de Bretagne, de Poitou et Vieille du Temple. Ces radiales croisaient une voie en arc de cercle dont on a gardé le principe pour dessiner la rue Debelleyme.

    Le diamètre de la place était de 156 mètres. Les pavillons en bordure, en pierres et briques, percés d'arcades, comme la place des Vosges, auraient hébergé une haute juridiction. Les artères qui rayonnaient devaient porter des noms de provinces françaises. On les retrouve aujourd'hui ; elles gardent en mémoire le souvenir d'un projet prestigieux.

    Il n'eut pas la chance de voir le jour. Le 14 mai 1610, Henry IV était assassiné par François Ravaillac, rue de la Ferronnerie (1er), sur fond de passion religieuse. Le Duc d'Epernon, qui accompagnait le roi, l'amène à l'hôtel de Retz, 9 rue Charlot (IIIe), pour lui éviter le lynchage. Il est exécuté en place de Grève le 27 mai, au terme d'un supplice dont la cruauté dépasse de très loin la gravité de son geste.

    Sully tomba en disgrâce et la régente, Marie de Médicis, n'eut pas le cran de donner suite. Le tracé de certaines rues avait pourtant été entrepris déjà. Elles furent conservées et formèrent un premier lotissement, bientôt complété par un autre au tracé orthogonal qui forma les rues Charlot, de Saintonge, du Perche et Pastourelle.

    Le Haut-Marais est riche en souvenirs et en occasions manquées. Il aurait pu conserver le Temple, à tout le moins son donjon si Napoléon avait été moins pusillanime ; il possèderait une merveilleuse place en éventail pas loin de la place des Vosges et dans le même style. Entre les deux, la rue de Turenne, une promenade merveilleuse que les badauds et le commerce de luxe se seraient accaparée … Mais voilà : il y eut Ravaillac.

    Henry IV assassinat

     

     

     

     

    L'assassinat de Henry IV par Ravaillac, huile sur toile de Charles-Gustave Housez, musée de Pau

      

    Bibl. "Le Marais" de Danielle Chadych, Parigramme  ; "Paris Patrimoine n° 2", dossier de Rémi Koltirine

      

      

  • Haudriettes 5 et 5bis cours rec
     Les deux hangars sur cours pavées des 5 et 5bis rue des Haudriettes (IIIe). (Cliquer sur la photo pour l'agrandir).

                                                                                                                                                    

    Ces constructions parasites prolongent sur les cours intérieures, dont ils détruisent malheureusement les proportions et l'esthétique, un local commercial qui occupe les pieds d'immeubles des 5 et 5bis sur la rue. Propriétés de la famille Quesnel au milieu du siècle dernier, les immeubles des 3,5 et 5bis sont de la même facture, une architecture XIXe siècle, lourde mais plutôt bien intégrée dans l'urbanisme de la rue.

    En 2001, la municipalité nouvellement élue à la tête de la Mairie de Paris, décide l'acquisition des immeubles du 3 et du 5, pour la somme de 130 Millions de Francs. Ils sont alors occupés à 60%. La SAGI, bailleur social de la Ville de Paris, procède à une rénovation sérieuse et les appartements libres sont affectés à des bénéficiaires de logements sociaux. On y relogera en particulier des familles victimes de l'incendie du squatt du "Roi Doré".

    Le 5bis n'est pas concerné. Pour faire face à ses charges, les propriétaires l'avaient préalablement vendu en copropriété.

    Un grossiste-importateur en maroquinerie occupait un local sur rue à l'enseigne "DIXIMPORT", prolongé sur les cours intérieures, par des hangars avec verrières, pour une surface totale de 400 m². Comme nous le disions dans notre journal "Vivre le Marais !" n° 31, le commerçant a déménagé en mars laissant ses locaux libres de toute activité.

    Au titre du PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) du Marais, les deux hangars figurent respectivement en tâches jaune (pour le 5) et orange (pour le 5bis), ce qui veut dire  que "leur démolition pourra être imposée à des fins de mise en valeur ou en raison de leur vétusté (sauf pour les tâches orange tant qu'il y a maintien des activités)". L'activité ayant cessé, les deux constructions sont vouées au même sort.

    Comment se peut-il, dans ces conditions, que la mairie du IIIe vienne de confirmer au conseil de quartier Ste Avoye, que ce local accueillera prochainement un MONOP', au grand dam des habitants copropriétaires du 5bis, qui viennent de distribuer un tract révélateur de leurs inquiétudes mais aussi du ressentiment qu'ils éprouvent à la constatation qu'une transaction, dont ils sont partie prenante, s'est déroulée au-dessus de leur tête.

    Haudriettes 5bis tract avril 2010

    Cette affaire présente plusieurs facettes.

    Un volet patrimonial, tout d'abord.

    Le PSMV a pour vocation de mettre en valeur le Marais en lui donnant une respiration qui lui fait encore défaut. Il ne fait de doute pour personne que les deux verrières que nous voyons sur la photo enlaidissent une cour pavée qui ne demande qu'à retrouver ses proportions originelles.

    Le PSMV est en révision et nous savons que les orientations prises, même si elles ne seront approuvées qu'à l'issue d'un processus de près trois ans, recommandent plus de considération pour la mémoire du XIXe siècle, son architecture et son héritage industriel. Peut-on affirmer que ces verrières entrent dans cette catégorie ? Certainement pas. Au nom de quels principes, l'agence Blanc-Duché chargée de sa révision et les architectes de Bâtiments de France pourraient-ils renoncer à une injonction de démolir ?

    Un volet économique, ensuite.

    La disparition du monopole du commerce de gros, et singulièrement de la maroquinerie d'importation, est un objectif que la mairie du IIIe partage avec les habitants. Il faut bien entendu accepter qu'il soit remplacé par autre chose. Un MONOP' de ce point de vue n'est pas forcément une mauvaise affaire si sa direction fait preuve d'une bonne écoute à l'égard des riverains.

    Un volet foncier, aussi.

    La démolition a un coût. Sans doute la RIVP, qui a pris la suite de la SAGI comme bailleur social du 5, pourrait y faire face, mais quid des copropriétaires du 5bis ? Sur quelle base indemniser le propriétaire de la verrière (qui ne vaut théoriquement que le prix du terrain) et y aurait-il accord pour financer les travaux de réhabilitation de la cour ?

    Un volet règlement de copropriété, enfin.

    La création d'un nouveau commerce implique des travaux d'aménagement intérieurs et extérieurs (devanture, enseigne) dont certains doivent être acceptés en assemblée générale. A défaut, la Direction du Permis de Construire et du Paysage de la Rue, puis les Bâtiments de France, dans le cadre de leurs compétences, ne peuvent examiner le dossier de façon formelle. Aux dires des membres du conseil syndical du 5bis, le dossier ne leur a pas été présenté. On observe, du reste, qu'aucune "Demande Préalable d'autorisation de Travaux" n'a été déposée bd Morland, au siège de l'urbanisme.

    Il ne faut pas s'étonner, en l'absence d'information, que des commentaires désobligeants circulent : pouvoir de l'argent, entregent, mépris du patrimoine collectif au bénéfice du lucre, volonté de passer en force …. Il existe une façon très simple de l'éviter : INFORMER, JUSTIFIER et NEGOCIER.

    Pour rejoindre l'association, cliquez ICI

       

  • Michel le comte 25 entrée

    25 rue Michel le Comte, entrée du passage et grossiste maroquinier


    Il reste peu d'ensembles immobiliers à réhabiliter dans le Marais.

    La rue Michel le Comte, il y a vingt cinq ans, était un coupe-gorge sinistre. On a assisté successivement à la restauration des hôtels Lenoir de Mézières (n°19), Ferlet, (n°21), d'Hallwyll (n°28), de plusieurs bâtiments d'un intérêt architectural certain comme l'hôtel Louis XV du n°16 en fond de cour, la Maison  du collège de la Marche (n°17), les bâtiments des n°22, 24 et 26 rénovés en 2001, avec des finitions, cependant, dont la qualité a été quelque peu sacrifiée, et le n°30, annexe de l'Hôtel Dieu sous Louis XIV, qui a conservé son portail à impostes et ses vantaux.

    Il y a une ombre au tableau : le gymnase qui n'honore ni son architecte, ni la Mairie de Paris qui en assura la maîtrise d'ouvrage dans les années 80.

    Il reste une vaste parcelle en friche, à laquelle on accède par le passage du 25, et qui s'étend très loin en arrière vers un ensemble de bâtiments XVIIIe et XIX, dans un état de délabrement qui lui donne un air de cour des miracles.

    Il est hors de question d'offenser ceux qui ont trouvé le moyen de s'y installer et d'y travailler, mais incontestablement nous avons affaire à un habitat qui mérite d'être réhabilité.

    Entrons ensemble dans cet univers qui pourrait effectivement servir de décor à une reconstitution des années 50.


    Michel le comte 25 passage  

    Un long couloir dessert les bâtiments sur rue, en arrière et jusqu'à une cour assez grande au sud. L'état des lieux dénote une absence totale d'entretien depuis des décennies.

       

    Michel le comte 25 atelier sur cour


    On découvre à droite un atelier sous verrière qui occupe l'essentiel d'une cour intermédiaire.

    Michel le comte 25 cour sud vue du passage

    La cour, au fond du passage, bordée de constructions de qualité très médiocre.

    Michel le comte 25 couloir escalier porte sur cour   

    Cette vue révèle l'état de vétusté des immeubles.

    Michel le comte 25 escalier à vis bât central

      

    Escalier hélicoïdal en fond de cour.

                                                                                                            

    Le devenir de cet ensemble immobilier a été longtemps incertain. Un moment, on a cru qu'une entreprise de rénovation en ferait l'acquisition mais un désaccord entre les propriétaires a fait échouer le projet. Finalement, c'est la Mairie de Paris qui a pris en charge sa réhabilitation et qui décidera de l'affectation des locaux et logements créés, à travers le bailleur social SGIM (société de gestion immobilière de la Ville de Paris).

    Il faudra au préalable faire des choix. Le bâti date des XVIIIe et XIX siècles. Tout ne mérite pas d'être conservé. Il semble à première vue qu'un curage sélectif s'impose car les constructions parasites sont nombreuses et créent un urbanisme anxiogène.

    Si on se réfère au PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) du Marais, pour cette parcelle, seuls les bâtiments sur rue sont à conserver. On comprend que le reste peut être démoli et en partie reconstruit, en prenant soin de ménager quelques espaces verts et de sauvegarder les cours pavées. Dossier complexe mais intéressant qui devrait passionner les Bâtiments de France et l'agence Blanc-Duché chargée de la révision du PSMV.

    Sans oublier la Mairie du IIIe qui voit dans cette opération l'une des dernières chances de récupérer du foncier pour le réhabiliter et étendre son parc de logements sociaux. On lira à ce propos l'intéressant article de Gauthier Caron-Thibault, Maire-Adjoint, sur son blog rue de bretagne, qui donne des précisions importantes sur la nature des logements envisageables et les moyens à mettre en oeuvre pour reloger les habitants et entreprises qui occupent l'espace aujourd'hui.

       

       

  •    Pierre au lard galerie spaghetti google coul

    En couleurs, l'implantation envisagée par les promoteurs pour la boite de nuit, du 14 rue Saint Merri au 3 de la rue Pierre au Lard. La partie jaune correspond à une "tâche jaune" du PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) du Marais.

       

    Nous rendions compte, dans notre article du 7 janvier, du refus du Préfet de Police de Paris et du Procureur de la République d'accorder une licence IV à ce nouvel ensemble.

    Depuis, les gérants du COX qui exploitent aussi le FREE DJ, 35 rue Ste Croix et ambitionnent de s'étendre encore en fusionnant le "Curieux Spaghetti", 14 rue St Merri et la galerie d'art du 3 rue Pierre au Lard, répondent qu'ils n'envisagent plus la création d'une boite de nuit mais un "centre pluriculturel avec studio d'enregistrement pour des groupes ou des émissions de télé, un lieu d'expositions temporaires et une salle pour des soirées ou des mariages" (Le Parisien)

    Il reste un hic cependant.

    Le bâtiment du 3 rue Pierre au Lard, une ancienne galerie d'art dont l'activité a cessé depuis quelque temps, est inscrite en "tâche jaune" au PSMV du Marais. Le PSMV est accessible en ligne désormais sur le portail de la Mairie de Paris. Pour accéder aux parcelles concernées, rien de plus facile, utilisez ce lien, puis cliquez dans la zone 7 du plan du Marais. Vous constaterez que le bâtiment du 3 rue Pierre au Lard brille d'un jaune vif qui ne laisse aucun doute sur sa qualification.

    Pierre au lard 3 travaux 18 11 09

    3 rue Pierre au lard

       

    Il s'agit, au titre de la légende du PSMV, accessible avec le même lien, d'un "immeuble dont la démolition pourra être imposée à des fins de mise en valeur ou en raison de sa vétusté"

    On est tenté de se dire que ce n'est pas sans raison que les promoteurs de ce projet ont préféré lancer les travaux d'urbanisme sans autorisation préalable de la Mairie de Paris. La vigilance des associations a permis d'interrompre le processus et leur a valu un procès-verbal et la menace d'être déférés en correctionnelle.

    Comment vont-ils surmonter ce nouvel obstacle ? Le risque est trop grand pour les riverains que le nouvel habillage du projet ne change pas sa finalité. Ils ne feront certainement rien qui puisse en faciliter l'exécution.

       

  • Pastourelle 35 angle temple fev 10
     Immeuble 35 rue Pastourelle (IIIe), aux arcades barricadées depuis un an par la mairie du IIIe pour éviter une occupation indésirable.

                                                                                                                                                                                                                                                       

    Le bâtiment fait partie de l'empire immobilier que France Telecom s'est constitué dans les années 50 sur le quadrilatère Temple, Pastourelle, Archives et (en partie) Haudriettes (IIIe). Nous en faisions la description en 2007en parlant des projets de l'opérateur, avec un point en 2009 sur l'avancement des opérations.

    S'agissant de l'immeuble "aux arcades", que des sans-abri avait investies avec du mobilier de fortune et dans des conditions sanitaires qui avaient été un souci journalier pour la mairie et la police, il avait été barricadé en attendant la solution à un conflit entre le propriétaire, France Telecom, et la Mairie de Paris. Celle-ci était intervenue pour exercer son droit de préemption sur une "déclaration d'intention d'aliéner" au bénéfice d'un rénovateur privé.

    Sans toutefois y mettre le prix. L'offre de la mairie, alignée sur l'évaluation des domaines, était 40% en retrait sur le montant prévu dans la transaction conclue. La justice, saisie par France Telecom, lui donna raison. La Mairie de Paris interjeta appel ….. On était parti pour une longue période d'immobilisme.

    Il fallut le pragmatisme du Maire Pierre Aidenbaum pour que l'affaire sorte de l'impasse. L'acheteur accepta de réserver un étage entier à un bailleur social. Cette concession lui valut d'obtenir son permis de construire en décembre 2009. Les travaux sont aujourd'hui sur le point de commencer.

    Cet immeuble a quelques particularités. Tout d'abord, il inclut l'espace sous les "arcades". Le domaine public disposait d'un droit de passage mais la municipalité y a renoncé. Les arcades vont donc être fermées dans la nouvelle configuration et l'espace récupéré sera affecté à des commerces qui occuperont tout le rez-de-chaussée, avec leur devanture à l'aplomb de la façade.

    Cette façade justement, qui est d'époque. C'est même tout ce qui reste du bâtiment originel du XVIIIème siècle. Elle a été conservée pour faire ce qu'on a appelé du "façadisme", avec une pointe de mépris. Il est vrai que cette démarche prive les architectes de toute occasion de briller mais quand on voit ce qu'ils ont fait de l'espace Beaubourg, du carrefour Temple-Michel le Comte (avec le gymnase et les constructions annexes), du centre scolaire et sportif Saint Merri, on se réjouit que le cadre architectural de l'espace Temple-Pastourelle n'ait pas été gâché par un ouvrage de la même veine.

    Dans un an, si tout se passe bien, le chantier sera terminé et les palissades retirées. On sera attentif aux activités économiques qui s'installeront au pied de l'immeuble. Les commerces de bouche, on n'y croit pas. Sont-ils d'ailleurs nécessaires en ce lieu précis ? des grossistes ? Ils renforceraient leur quasi monopole dans le quartier, sur un marché qu'ils qualifient eux-mêmes de morose. La tendance est plutôt à leur déplacement vers Aubervilliers. Des activités du tertiaire ? C'est dans la vocation du IIIe, au même titre que les métiers d'art. C'est ce que nous espérons.