Vivre le Marais, Vivre Paris Centre !

Chronique de la vie au cœur et autour du centre historique de Paris

Catégorie : Urbanisme, PSMV

  • Turenne cuirassé st antoine 

    L'immeuble en finition, angle 76 rue Saint-Antoine et 1 rue de Turenne (IVe).

     

    En toute franchise, c'est moins laid qu'on a pu le craindre et la fusion de l'immeuble dans son environnement s'opère assez bien. La noirceur des tôles perforées est un effet non désiré de la photo et de l'éclairage. Peut-être seront elles peintes in fine, nous n'en savons rien pour le moment (un commentaire de la mairie du IVe, à ce propos, serait apprécié).

    Nous annoncions sa construction dans le bulletin16.pdf (été 2006) en disant qu'il ne "manquait pas d'audace" mais, contrairement à d'autres associations dont nous comprenions néanmoins l'indignation, nous ne l'avions pas expressément condamné. Après tout, les Bâtiments de France l'avaient béni  sans avoir apparemment cédé à des contraintes.

    Il reste maintenant à cet ouvrage à affronter le jugement de ses habitants, et l'épreuve de l'opinion ambiante …. et du temps.

    mots-clés : urbanisme, architecture moderne, Marais            

                                                                                                                                         

  • Amelot de bisseuil vue générale  Amelot de bisseuil

     La construction de l'Hôtel, commandée par Denis Amelot de Chaillou, 47 rue Vieille du Temple (IVe) remonte à la seconde moitié du XVIIe siècle. C'est son fils Jean-Baptiste Amelot de Bisseuil qui lui a laissé son nom. Il hébergea les ambassadeurs de Hollande autour de 1715 et connut d'autres occupants prestigieux, notamment Caron de Beaumarchais, qui composa dans ses murs en 1778 son frivole "Mariage de Figaro". A droite, portail et fronton. A gauche, vue générale et magasin Oliviers & Co, spécialiste en huiles d'olives.

     

    Détenu aujourd'hui par une société civile immobilière, la SCI Amelot de Bisseuil, qui gère les biens de la fondation Paul-Louis Weiller du nom de l'industriel et mécène qui fit l'acquisition de l'Hôtel en 1951, ce patrimoine remarquable cherche un nouveau souffle. Plusieurs options sont étudiées actuellement par les propriétaires pour que ces bâtiments en jachère soient désormais le cadre d'activités économiques ou culturelles dignes de ce qu'ils sont.

    La restauration entreprise avant la seconde guerre mondiale, et qui s'est poursuivie ensuite avec le concours et sous le contrôle de Jean-François Lagneau, Architecte en Chef des Monuments Historiques, en a fait un ensemble architectural parmi les plus riches du Marais, même si beaucoup encore reste à faire, notamment le ravalement de la façade et du fronton qu'on voit sur la photo.

    Pierre Kjellberg, dans son "nouveau guide du Marais" en décrit la richesse : "portail avec vantaux en quatre parties, sculpté par Thomas Regnaudin, fronton où sont représentées des figures de la guerre et de la paix. Au revers, Romulus et Remus. Vantaux décorés de médaillons d'enfants tenant des masques de méduses. Les bâtiments s'organisent autour d'une cour d'honneur étroite avec balcon à balustres de pierre et fronton soutenu par quatre termes d'enfants, et seconde cour plus vaste avec façade élégante percée de quatre niches ornées de statues. L'intérieur conserve quelques pièces exceptionnelles avec décors et plafonds intacts ou bien restaurés".

    Oliviers & Co, distributeur mondial d'une carte de  25 crus exceptionnels d'huiles d'olives, tient boutique au rez-de-chaussée. Rose-Marie Fournier, qui gère le magasin, craint pour la pérennité de son bail. Dans le doute, le président Albert Baussan a décidé de le déplacer. Pour l'installer où ? nous en sommes ravis, dans le local de la fameuse pharmacie du 36 rue des Francs-Bourgeois (IIIe). On se souvient qu'elle défraya notre chronique avec la tentative de Tara Jarmon d'y implanter un magasin de vêtements, dont le projet de devanture sur l'Hôtel Poussepin  souleva l'indignation des copropriétaires et autres amoureux du Marais.

    Oliviers & Co promet de conserver la devanture en l'état, comme l'exigent les Bâtiments de France. Ils se contenteront, ce qui est admis, de remplacer le bandeau "pharmacie" par leur propre enseigne. C'est l'épilogue d'un combat amorcé en août dernier par les riverains, soutenu par notre association, contre un projet qu'ils désapprouvaient.  www.vivrelemarais.typepad.fr/blog/2008/08/index.html  (archives, article du 30 août 2008).

    Nous restons très attentifs au devenir de l'Hôtel lui-même. Pour en avoir parlé avec le président de la société qui le gère, nous avons le sentiment qu'il agira dans le respect du cadre architectural du Marais et avec le souci de protéger les riverains d'une atteinte à leur environnement.

    Gérard Simonet

     

    mots-clés : Amelot de Bisseuil, Ambassadeurs de Hollande, Marais, monuments historiques, Vieille du Temple, Oliviers & Co, pharmacie

                                                                                                                                            

  • Morland 

    17 boulevard Morland – IVe – Le siège de la Direction de l'Urbanisme de la Mairie de Paris

     

    C'est dans ce bâtiment contemporain, austère et sans âme, qu'Alexandre Gady qualifie de "soviétique", que s'élabore le Plan Local d'Urbanisme (PLU) de Paris. C'est là aussi que sont instruits les dossiers de demande de permis de construire. Les cordonniers, c'est bien connu, sont souvent les plus mal chaussés.

    Adopté en octobre 2007, après une passe d'armes avec les "Verts" qui se battaient contre les tours, le PLU nous est déjà soumis pour avis avant modification. Une enquête publique est en route. Le dossier pourra être consulté dans les mairies, celle du IIIe les 7 et 28 janvier 2009, celle du IVe, les 22 décembre et 31 janvier. Attention aux horaires, qui sont indiqués sur les panneaux d'information.

    De quoi s'agit-il ? en quoi sommes nous concernés ?

    Le but est de modifier certaines dispositions et d'en ajouter d'autres.

    A première vue, nous ne sommes pas impliqués puisque le PLU ne s'applique pas au Marais, qui bénéficie d'un plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV). Mais ce plan est en cours de révision pour, précisément, le mettre en harmonie avec le PLU de Paris. A la clé, une hausse du COS (coefficient d'occupation des sols) de 20% pour le logement social et 20% pour les bâtiments écologiques, des dispositions contre l'entreposage de marchandises en environnement résidentiel et une tentative de protéger le commerce traditionnel, en instance de jugement en appel, devant le Tribunal Administratif. On voit que ces dispositions nous concernent potentiellement.

    Dans les modifications proposées, on trouve pêle-mêle des mesures : pour favoriser le développement durable, comme l'acceptation de saillies sur les immeubles si leur finalité est d'économiser ou produire de l'énergie (panneaux solaires, éoliennes** … ), pour humaniser l'urbanisme par la création de voiries nouvelles, ou construire de nouveaux logements sociaux en assurant la récupération d'espaces délaissés.

    On trouve aussi des corrections d'erreurs de jugement dans l'élaboration du plan initial. Par exemple, pour les nouvelles constructions, une hauteur de plafond pour les rez-de-chaussée de 2,50 mètres est, à la réflexion, jugée insuffisante. On décide de la porter à 3,50 mètres. Cette intention paraît légitime. Mais comme la hauteur de l'immeuble est limitée, il faut soit supprimer un étage, ce qui met en cause l'économie du projet, soit accepter une augmentation des hauteurs de un mètre. C'est ce qui est proposé.

    Une volonté qui anime autant la Mairie de Paris que le Gouvernement va faire grincer des dents. De part et d'autre, on veut contrarier le développement des locations de logements meublés aux touristes. On sait que ces activités rapportent beaucoup plus que la location de logements vides. On va décourager cette pratique. Comment ? Le gouvernement pourrait peser sur la fiscalité des loueurs en meublés professionnels et non professionnels. Quant à la Mairie de Paris, nous attendons de savoir quels leviers elle pourrait actionner.

    On trouve d'autres modifications dans le projet mais elles nous paraissent mineures ou ne concernent pas nos quartiers, notamment l'ajout d'une quarantaine d'immeubles sur la liste "protection Ville de Paris" (qui en comporte 5.000), en exécution d'un voeu de la Commission du Vieux Paris.

     

    ** qu'on se rassure, il ne s'agit pas d'éoliennes à hélices, avec leurs pales      gigantesques, mais de turbines moins encombrantes.

                                                                                                                                   

                                                                                                                                                    

     

     

     

  • Charlot 21 avant renovation 

    21 rue Charlot (IIIe), il y a deux ans

     

    Charlot hotel marais d'anjou après travaux 

    La rénovation qui est l'oeuvre de la COGEDIM.

    Il serait plus étonnant encore de comparer les intérieurs. Tout n'était que ruines et délabrement. Ce qui pouvait avoir encore une valeur marchande avait été pillé : rampes d'escaliers, portes, fenêtres, fils de cuivre…. Baudelaire se serait plu à promener son spleen dans ce décor hallucinant. C'était, dans les années 90, le squat "Marais Publique".

    La nouvelle résidence occupe la place d'une ancienne maison début XVIIe siècle, construite pour M. Desjardins, maçon, côté 21 rue Charlot et d'un hôtel non identifié du XVIIIe, côté 6 rue Pastourelle (source A. Gady). Implantée sur plusieurs bâtiments, trois cours intérieures, un jardin à la française et une courette, elle respecte tout à fait le style de la rue et le caractère du Marais. Elle répond aujourd'hui au nom de "Hôtel d'Anjou du Marais", comporte 43 logements de haut standing, dont les prix tournent autour de 11.000€ le m². Néanmoins, 25% de la surface habitable est constituée de 14 appartements à caractère social (locatif aidé). Les bénéficiaires sont des employés du Ministère des Finances.

    Le Maire du IIIe, Pierre Aidenbaum, s'est longtemps fait prier pour donner son feu vert au permis de construire. Le PLU (plan local d'urbanisme) de Paris fait désormais obligation aux entreprises de rénovation, pour des surfaces de plus de 1.000 m², de réserver 25% de leurs projets au logement social. Dans le IIIe, mais aussi dans le IVe, à l'intérieur du périmètre du PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) du Marais, le PLU ne s'applique pas. Il a donc fallu que Pierre Aidenbaum joue de sa force de persuasion (et de quelques leviers dont tout Maire dispose) pour convaincre la COGEDIM de se plier à ses demandes.

    C'est une manière de procéder qui a ses avantages : les finances de la Ville, donc l'argent des contribuables, ne sont pas sollicitées, l'exécution est rapide et l'objectif social est préservé. C'est cette approche qui pourrait résoudre, comme nous l'avons dit précédemment, le problème aigu du 35 rue Pastourelle et de ses arcades.

    Dans le Marais, mais singulièrement dans le IIIe, il y a encore de nombreux immeubles qui servent d'entrepôts aux grossistes. Leur absence de motivation pour entretenir un patrimoine qui possède une vraie valeur intrinsèque, cause la dégradation d'une partie de notre parc immobilier. Créer des logements dans un secteur où il n'est pas possible de construire, c'est avant toute chose réhabiliter ces constructions et les rendre à l'habitation, en confiant leur rénovation à ceux dont c'est le métier. L'expérience montre qu'il est possible d'obtenir d'eux qu'ils assurent la diversité des occupants.

                                                                                                                    

    Temple 104 vue generale 

    Cette photo, rue du Temple, illustre bien notre propos. L'immeuble possède une certaine valeur architecturale, le porche est généreux, mais on constate à la vue du premier étage, qu'il est en situation de quasi abandon. On trouve d'autres appartements sur cour ou en étage dans le même état de désolation.

    Une politique intelligente en matière d'urbanisme, dans nos quartiers, ne doit pas se limiter à trouver des hangars aménageables on des immeubles à surélever. Elle doit agir pour que les conditions de transformation du parc immobilier défavorisé, qui doit être mis en valeur et rendu accessible à l'habitation, soient désormais remplies.

                                                                                                                                           

                                                                                                                         

  • Pastourelle 35 nov 08 

    Le trop fameux immeuble à l'angle Temple-Pastourelle, dont les arcades sont évacuées de leurs occupants chaque jour par les forces de police et nettoyées de leurs immondices par la Propreté de Paris.

     

    Le bar qui lui fait face, "Le Roi du Café", ne décolère pas. Ce ballet quotidien et les nuisances qui l'accompagnent ne font pas ses affaires, pas plus qu'il ne réjouit des riverains, à qui les arcades sont interdites de fait, et qui redoutent un nouvel incendie, comme en février 2008, où le feu à un parc de deux-roues a mis leur immeuble du 119 rue du Temple, juste en face, en danger sérieux.

    L'immeuble, vide, appartient à France Telecom qui a décidé de le vendre. Un rénovateur a fait une offre. La Mairie de Paris a exercé son droit de préemption à un prix qui est inférieur de 40%. France Telecom a refusé et l'affaire est allée devant le Tribunal Administratif. Le jugement est tombé : la Mairie de Paris doit s'aligner sur le prix de l'offre ou renoncer à préempter.

    Soucieux de ne pas perdre la possibilité de réaliser des logements à caractère social dans cet immeuble qui comporte une dizaine d'appartements, le Maire du IIIe, Pierre Aidenbaum, a engagé des négociations avec le repreneur potentiel. Habile et conciliant, il a obtenu en principe que le rez-de-chaussée lui soit réservé, ainsi que les sous-sols, et que un tiers des appartements lui soient cédés à un prix préférentiel, compatible avec une offre de logements à loyers modérés. C'est mieux que le PLU (plan local d'urbanisme) de Paris qui fixe cette obligation à 25% de la surface habitable.

    Il est légitime, pour Pierre Aidenbaum, de se demander dans ces conditions s'il faut poursuivre la procédure d'appel, avec le risque de perdre à nouveau. Il s'engagerait alors dans une voie qui n'aurait pas de chances d'aboutir à la mise de logements sur le marché avant 4 ou 5 ans. A l'opposé, le repreneur s'engage à livrer l'immeuble rénové sous 20 mois et à commencer immédiatement les travaux, ce qui aurait pour effet de libérer le quartier des nuisances que nous subissons du fait de l'état d''abandon de l'immeuble.

    Pierre Aidenbaum a donc la possibilité de régler le problème au mieux de l'intérêt général. Il lui reste à finaliser sa négociation et à convaincre l'Hôtel de Ville de le suivre.

                                                                                                                                      

  • Résidence la perle 

    Résidence de la Perle, rebaptisée "Madeleine Béjart", 2 rue de la Perle (IIIe)

     

    Avec le conseil de quartier concerné, nous demandions depuis trois ans que la façade de cette maison de retraite pour personnes âgées, décrépie et décrépite, soit ravalée, à la fois par souci de dignité à l'égard de ses pensionnaires et pour sauvegarder l'esthétique d'un ensemble immobilier qui accompagne l'Hôtel Salé (musée Picasso).

    La Direction des Affaires Sociales de Paris dont elle dépend, a mis du temps à réagir à une intervention du Maire mais ces échaffaudages témoignent que les travaux sont désormais engagés.

    Que ceux qui savent me pardonnent de rappeler que l'Hôtel Salé doit son nom à Pierre Aubert de Fontenay, Fermier des Gabelles, pour qui il fut construit en 1656 par l'architecte Jean Boullier de Bourges. La gabelle était l'impôt sur le sel. D'où le surnom d'Hôtel "Salé" qui lui est resté.

    Il a hébergé l'Ecole Centrale de Paris (Ecole Centrale des Arts & Manufactures), à sa création en 1829, avant qu'elle n'aille occuper les bâtiments de l'actuel IIIe, dans le rectangle des rues Montgolfier, Conté, et Vaucanson, avant son expatriation, au vert, à Chatenay-Malabry.

    Auparavant, en 1671, il fut lui aussi le siège de l'ambassade de la république de Venise en France. 

    Il subit actuellement une cure de rajeunissement avec la réfection totale des façades sur rues, cour d'honneur et jardin. Les travaux se déroulent en quatre tranches de 8 mois chacune. Il est fermé en ce moment en réouvrira ses portes au public le 24 octobre, pour un temps.

                                                                                                                                      

                                                                                                                                      

  • Cour venise

    Résidence de la Cour de Venise, 10-14 rue Saint-Gilles (IIIe)

     

    C'est un ensemble d'immeubles dont l'origine remonte au milieu du XVIIe siècle, avec l'Hôtel de Venise, résidence de l'ambassadeur de la sérénissime République de Venise. Il devint l'Hôtel de Morangis, au cours du siècle suivant, après adjonction de quelques dépendances qui en étendirent la surface.

    Au début du XIXe, l'Hôtel fut démoli et le site affecté à des activités industrielles et locatives. Il s'y installa une population modeste et des artisans. Il y a quelques années, sa situation, à deux pas de la place des Vosges, en fit la cible de promoteurs qui envisagèrent d'y construire des logements de luxe. Un collectif d'habitants et des associations s'unirent alors autour du Maire du IIIe, pour qu'un projet plus social voie le jour.

    La réhabilitation a été réalisée sous la maitrise d'ouvrage de la SAGECO, l'un des bailleurs sociaux de la Mairie de Paris. Bien que social, il s'agit d'un habitat de bon standing qui n'a rien sacrifié aux exigences de l'esthétique du Marais. Les bâtiments sont bas et l'équilibre des volumes a été respecté. Il s'agit de petits appartements en général mais certains, sur un total de 75, dépassent 100 m² de surface et peuvent accueillir des familles.

    La cour est bordée d'une quinzaine de locaux avec vérandas, qui sont destinés à abriter des artisans, des artistes ou des créateurs. Un de ces locaux, plus grand, a été affecté aux activités d'un centre médico éducatif, "Autisme 75", qui prend en charge les adolescents autistes. Sa Directrice, Laurence Piou nous a indiqué brièvement ses objectifs : prise en charge de jour de 17 jeunes gens pour les accompagner dans leur insertion sociale. Ce chiffre sera porté à 22 en mars 2009 avec internat alterné à raison d'une semaine sur cinq.

    Tous les logements sont affectés voire occupés déjà. Les locaux commerciaux ont du mal, en revanche, à trouver preneurs. Il faut dire que les loyers sont au niveau du marché et que les artisans, dans l'économie d'aujourd'hui, se font rares, en dépit d'une demande qui ne faiblit pas. C'est un paradoxe qu'on a quelque mal à comprendre.

                                                                                                                                                   

  • Barbette_12_charpente

                                  

    Nous sommes ici dans les combles, sous la
    charpente, de l'Hôtel du "Docteur MISSA", du nom de celui qui en fit
    l'acquisition en 1774
    .

                                              

    Situé au 12 de l'actuelle rue Barbette (IIIe), les origines de ce bâtiment
    se perdent dans la nuit des temps. L'examen de ses caves
    voûtées incite à penser qu'elles constituaient en partie les
    soubassements de l'ancien Hôtel Barbette, qui occupait à la fin du XIVe
    siècle l'essentiel de l'espace compris de nos jours entre les rues des
    Francs-Bourgeois, Vieille du Temple, de la Perle et Elzévir.

    Le promoteur de l'opération, la société "Lions Saint Paul Rénovation", nous apprend que ce chantier a pour objet la transformation de locaux commerciaux (ex. vêtements WEIL) en logements, la restauration des façades, des lucarnes et de la toiture, dont les
    liaisons verticales sont modifiées pour s'aligner sur l'architecture ambiante, l'aménagement des combles avec mise en valeur des pièces maîtresses de la charpente.

    Cette visite nous a donné envie de faire un long voyage dans le temps.

    A la fin du XIVe siècle, la rue Barbette que nous connaissons
    n'existait pas encore. Le nom des Barbette, en revanche, bénéficiait
    d'une certaine renommée. Ses origines remontent à 1030, et dès le XIIe
    siècle, cette famille était l'une des plus riches de Paris.

    Elle possédait au XIIIe siècle une "propriété" constituée de bâtiments et d'une "courtille", ensemble de jardins et de cultures, tout près des murs de Paris, dans cette campagne un peu marécageuse qui allait devenir "le Marais". Ce
    patrimoine, associé à  d'autres biens dans Paris intra-muros, valut à la
    famille de donner son nom à l'actuelle rue Vieille du Temple et à une
    poterne qui offrait un passage à travers la muraille Philippe Auguste,
    qui protégeait Paris. On pénétrait donc dans Paris par la "Porte
    Barbette".

    La rue des Francs-Bourgeois s'appelait à l'époque "rue des Poulies".
    Elle longeait la muraille par le nord et était jalonnée d'ateliers,
    appelés "poulies", spécialisés dans la fabrication de tissus. Pour les
    produire en rames de plusieurs dizaines de mètres, ils devaient
    disposer d'espace et on imagine que la manipulation de ces longues
    bandes de tissus mettait en oeuvre des câbles,  guidés par des poulies.

    Les autres frontières du quadrilatère étaient constituées par des
    chemins le long des "Coutures" (comprenez "cultures") Sainte
    Catherine", au nord et à l'est.

    Cette industrie, associée aux cultures environnantes, firent probablement la richesse de leurs exploitants et
    progressivement les ateliers cédèrent la place à des demeures de plus
    en plus somptueuses, au point que la Reine de France, Isabeau de
    Bavière, épouse du Roi Charles VI (dit le fou), fit l'acquisition en 1401 de la
    plus prestigieuse de toutes, l'Hôtel Barbette, auprès de Jean de
    Montagu, surintendant des finances du Roi. Elle en fit sa
    résidence secondaire, pour s'éloigner de son époux, qui souffrait de démence, et vivre en toute discrétion sa passion coupable pour
    son beau-frère le Duc d'Orléans.

    On sait ce qui se passa en 1407, dans cette ruelle que les
    arbalétriers de la Reine empruntaient régulièrement pour aller s'exercer au tir le long de la muraille Philippe-Auguste. Le Duc
    d'Orléans fut assassiné par un groupe de 18 spadassins à la solde de
    son cousin le Duc de Bourgogne, dit Jean-sans-Peur. La Reine, pour qui
    le Duc d'Orléans "eut cette essoine", ne s'en remit pas et s'empressa
    de vendre sa demeure, après avoir prudemment rejoint ses foyers de
    l'Hôtel Saint Paul et son roi de mari. 

    Jean-sans-Peur sut habilement convaincre la Cour et son entourage que cette exécution était justifiée car les idées religieuses de son cousin étaient dangereusement réformistes. A l'issue d'une campagne contre les Liégeois, en Flandre, il revint à Paris, fit fuir le roi et la reine, et devint maître de la capitale.

    Quant à l'Hôtel Barbette, il échut à Jean VI, Duc de Bretagne. On ne va
    pas en faire l'histoire ici : ceux qui s'intéressent au détail des vicissitudes de cette demeure pourront se reporter à l'excellent ouvrage de Charles
    Sellier "Le Quartier Barbette" (1899). Il est utile pourtant de
    souligner, au titre de ses lettres de noblesse, qu'il devint la propriété de Diane de Poitiers, épouse du Comte Louis de Brézé, et maîtresse de Henri II, fils de Francois 1er.

    A sa mort, ses héritières procédèrent à la vente de la propriété par
    lots. Nous sommes en 1563, c'est la fin de "l'Hôtel Barbette" et la date de création de la rue Barbette telle que nous la
    connaîssons, qui perpétue  le souvenir de cette lignée prestigieuse.

    Qu'en est-il aujourd'hui de ce quartier ? l'impasse des Arbalétriers
    appartient à la copropriété du 56-58 rue Vieille du Temple, comme en atteste un document émanant de la Mairie de Paris. Sa façade,
    défigurée par les graffiti, attend toujours d'être ravalée, au contraire, heureusement,
    de celle qui lui fait face, propriété du 34 rue des Francs-Bourgeois,
    qui a su mettre en valeur son caractère moyenâgeux. Les hangars LISSAC
    et du Centre Culturel Suisse ( revoir votre article du 17 janvier 2008)
    attendent que la Ville s'en occupe pour en faire des jardins
    conformément aux prescriptions du PSMV (plan de sauvegarde et de mise
    en valeur) du Marais. La reconstitution des cheminements d'origine est
    prévue et avec elle la perspective d'organiser des parcours historiques qui donneraient à ce secteur du IIIe arrondissement un attrait exceptionnel .

    Faire revivre cette histoire très riche est un projet ambitieux qui
    devrait mobiliser ceux qui ont le pouvoir de le conduire. Bertrand
    Delanoë, qui nous a assurés de son attachement pour le centre
    historique de Paris, les Maires d'arrondissements et au premier chef 
    Pierre Aidenbaum qui en est le dépositaire, la Direction Régionale des
    Affaires Culturelles, le Service Départemental de l'Architecture et du
    Patrimoine (dont dépendent les Architectes des Bâtiments de France).
    Mais aussi les habitants, leurs associations, les conseils de
    quartiers, les commerçants. Nous devons tous oeuvrer pour que cette
    ambition se concrétise.
                                                                                                                                                           

  • Rosiers (2) La rue des Rosiers (IVe) au soleil levant

                                        

     

    Une révolution discrète se prépare.

    Lancé en 1962, par Michel Debré et André Malraux, consacré en 1996 par un décret qui en arrête les détails, le PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) est devenu le document d'urbanisme du secteur qui englobe une grande partie des IIIe et IVe arrondissements du centre historique de Paris, connu sous le nom de "Marais".

    La Ville de Paris, ses Maires successifs, les Maires des arrondissements concernés, ont pris peu de part à sa conception et ont toujours manifesté de la distance dans sa gestion quotidienne. Nous avons regretté cette attitude dans plusieurs articles de ce blog et de notre journal (voir notamment lettre ouverte aux Maires sur la gestion du PSMV,  du 22 septembre 2007).

    Les choses vont changer. A l'origine, les décisions de décentralisation du gouvernement qui ont inspiré les nouvelles règles de fonctionnement des secteurs sauvegardés, concrétisées par le décret 2007-452 du 25 mars 2007 et la mise en révision du PSMV du Marais. Désormais, la création et la gestion de ces secteurs ne sont plus l'affaire exclusive de l’État mais de la responsabilité conjointe des municipalités et de l’État.

    Le Décret n° 2007-452 du 25 mars 2007 relatif aux secteurs sauvegardés  instaure une Commission Locale du Secteur Sauvegardé. Celle qui nous intéresse est en cours de constitution et devrait être opérationnelle dès le mois de juin. Ses membres sont composés à égalité de personnes désignées par la Ville de Paris et par l'Etat (le Préfet). Elle interviendra à la fois dans le processus de révision du PSMV, qui est véritablement lancé puisque le cabinet d'architectes Duché-Blanc chargé de le piloter vient de recevoir son contrat, et dans sa gestion quotidienne qui devrait cesser d'être la victime du désintérêt de la Ville pour des affaires qu'elle ne s'était pas réellement appropriées.

    Notre statut d'association agréée au titre du code de l'environnement et notre implication dans la conservation du cadre de vie du Marais nous ont incités à faire acte de candidature pour être membre à part entière de la Commission. Le nombre de nos adhérents (près de mille personnes ont adhéré à l'association depuis sa création en septembre 2000), notre couverture du IIIe et du IVe arrondissement et les moyens que nous avons mis en œuvre pour l'action et la communication, justifient notre revendication de prendre notre part des décisions ou des orientations qui viendront de cette instance. D'autres associations, dont la compétence et la notoriété sont reconnues, y siègeront aussi.

    L'une de nos priorités, car le sujet a été négligé jusqu'à ce jour, sera la qualité du paysage de la rue. Il n'est pas admissible que tant d'efforts aient été consentis pour réhabiliter des monuments et des immeubles, tant d'argent dépensé en ravalements dont les effets sont visibles et appréciés, si des devantures de commerces défigurent l'environnement sans aucun souci de respecter l'unité architecturale, l'esthétique et le caractère du lieu.

    Trop d'accessoires indésirables polluent l'environnement, en infraction avec le règlement du PSMV : rideaux roulants et leurs coffrages, stores, bannes, bâches plastiques sur les terrasses, "inserts" pour la réclame sur les murs, enseignes qui jurent et, bien qu'il s'agisse davantage de propreté" que d'urbanisme, l'invasion croissante de l'affichage sauvage sous toutes ses formes.

    Si notre participation se confirme, nous serons à la source d'une information que nous diffuserons et commenterons en toute liberté puisque aucun lien, hormis le respect que nous leur témoignons, ne nous attache à la Ville ou à l’État.

    Gérard Simonet

     

  • Lissac

    Le grand hangar LISSAC  (au second plan) vu du 5ème étage du 34 rue des Francs-Bourgeois (IIIe). Au premier plan, (vue sur pignon) la verrière du Centre Culturel Suisse. Deux constructions qui doivent disparaître conformément au PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) du Marais, quand les conditions sont satisfaites.

    Depuis plusieurs années maintenant, le hangar LISSAC est inactif. Inscrit en orange (*) dans le PSMV du Marais, il est voué à la démolition. Les plans parcellaires précisent "espace vert à réaliser". Rappelons que l’objectif du PSMV est progressivement d’éliminer les constructions parasites pour rendre à nos quartiers la pureté de leur architecture originelle et donner de la respiration à un bâti très dense qui offre trop peu d’espace et de verdure.

    En vertu d’un contrat signé avec la Ville de Paris, LISSAC avait obtenu le droit de conserver le bâtiment jusqu’à fin 2006, sous réserve de le céder gratuitement à la municipalité à cette échéance.

    Dès que nous avons été avisés de l’affaire, nous en avons informé le conseil de quartier et le Maire du IIIe Pierre Aidenbaum, qui nous a alors assurés, après en avoir référé à l’Hôtel de Ville, que les dispositions du PSMV seraient appliquées et que l’espace libéré par la démolition (600 m² environ) serait transformé en jardin public. Nous nous sommes naturellement réjoui de cet engagement.

    Le projet a achoppé toutefois sur une contestation des héritières de LISSAC, au motif que le contrat conclu avec la Ville comportait des vices de forme qui le rendaient inopposable. Le litige est allé devant les tribunaux, mais en cours de procédure, les plaignantes ont renoncé au recours.

    Le champ est libre par conséquent. La mairie devra naturellement s’assurer de la faisabilité du projet. L’accès, en particulier, pose un problème. Il peut se faire aujourd’hui par le passage des Arbalétriers mais cette voie est privée. Un accord avec ses propriétaires devrait être recherché. Il existe une alternative, l’accès par la rue Vieille du Temple ou par la rue Barbette, mais les préalables sont du même ordre.

    Quoiqu’il en soit, l’attente est forte de la part des riverains et des amoureux du Marais, qui n’oublient pas le caractère historique du lieu. C’est là en effet, suivant certains témoignages, que venant de l’Hôtel Barbette  où il était allé souper chez la  reine (et, disent les pipistrelles, sa maîtresse) Isabeau de Bavière, et se dirigeant vers l’église Saint Paul, le Duc d’Orléans tomba dans un traquenard ourdi par des sbires du Duc de Bourgogne, Jean sans Peur, qui le laissèrent sur la chaussée, le poignet tranché et le crâne fendu (récit de Gourdon de Genouillac). Il est donc établi qu’à l’époque on pouvait cheminer de la rue Barbette vers la rue des Francs-Bourgeois par le passage des Arbalétriers ou accéder directement à la rue Vieille du Temple.

    La création d’un jardin public et l’aménagement d’une promenade sur le parcours du Duc d’Orléans seraient d’un haut intérêt environnemental et touristique. La ruelle est aujourd’hui maltraitée. Ravalée sur sa rive droite (merci au Centre Culturel Suisse et aux autres copropriétaires) elle attend un traitement identique en face où les murs sont délabrés et couverts de graffiti. Elle témoigne pour nous des XIIIe/XIVe siècles dont elle a conservé l’architecture et la voirie et il y règne un parfum de moyen âge qui dépayse agréablement.

    Arbaltriers_rnov

    Les candidats aux municipales sont friands de projets phare. Celui-ci l’est particulièrement, y compris dans sa difficulté de mise en oeuvre qui implique persévérance, imagination et diplomatie du fait des nombreuses copropriétés  concernées. On appréciera de connaître leur point de vue et leur motivation à le mener à terme. Pour sa part, Pierre Aidenbaum a déjà pris des initiatives, nous espérons qu’il est animé du désir de conclure.

    La ruelle des Arbalétriers, qui borde le 34 rue des Francs-Bourgeois (IIIe), (anciennement "rue des poulies")

                                                                                  

    (*) Les "taches jaunes" sont des constructions dont la démolition est demandée. Les "taches orange" accordent aux bâtiments concernés un répit tant qu’ils abritent une activité économique.