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Étiquette : cloitre billettes

  • Le miracle oublié des Billettes (IVe) …

      
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     Une scène d'un vitrail de l'église Saint-Etienne de Bar sur Seine illustrant le miracle des Billettes 

     

    Qui imaginerait aujourd’hui que l’existence dans notre quartier de l’église et du cloître des Billettes (IVe) est le fruit d’un miracle qui s’est produit au cours du XIIIe siècle ?

    L’histoire rapporte qu’une femme désargentée voulant absolument obtenir restitution de ses vêtements mis en gage, auprès d’un prêteur juif du nom de Jonathas pour la fête de Pâques, avait dû donner une hostie consacrée en échange à ce dernier. Dès qu’elle lui remet l’hostie, l’homme poignarde l’hostie qui se met aussitôt à saigner. La plongeant aussitôt dans l’eau bouillante, celle-ci rougit et le Christ serait alors apparu.

    Les thèses sont divergentes ensuite. D’aucuns prétendent que malgré sa conversion et celle de sa famille, le prêteur fut brûlé en place de Grève. D’autres prétendent qu’il fut gracié en raison de sa conversion. Il est dit qu’à la suite de cette affaire et avant que leurs relations ne deviennent conflictuelles, le roi Philippe le Bel et le pape Boniface VIII autorisèrent la construction d’une chapelle expiatoire à l’endroit même où les faits s'étaient produits.

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    Le cloître des Billettes

     

    L’édifice religieux est confié aux Frères Hospitaliers de la Charité Notre Dame surnommés les Billettes, sans doute à cause de la forme rectangulaire de leur scapulaire qui ressemblait à celle des pièces plates de métal de certains vêtements d’armes appelées des billettes. La chapelle devint vite un lieu de pèlerinage très fréquenté et une nouvelle église doit la remplacer au début du XVe siècle financée par les nombreux dons des pèlerins. Le cloître lui fut adjoint en 1427. Il s’agit du seul de cette époque qui existe encore à Paris aujourd’hui. La rue qui le longeait s’appelait "la rue où Dieu fut bouillie". Les maisons que nous pouvons voir au-dessus du cloître sont des XVIIe et XIXe siècles.

     

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    La façade du temple des Billettes

     

    Des représentations du « Miracle de l’Hostie » ou « Miracle des Billettes » sont visibles sur des vitraux des XVIe et XVIIe siècles de Notre Dame du Mont, de l'église Saint-Etienne de Bar sur Seine, ainsi qu’au Musée des Antiquités de Rouen (les vitraux proviennent de l’église Saint Eloi de la ville) et sur une enluminure du XVIe siècle exposée au château de Saumur.
    Confié ensuite aux Carmes-Billettes au XVIIe siècle, la construction d’une nouvelle église est envisagée mais ce n’est qu’un siècle plus tard que les religieux font appel à Jacques Hardouin Mansart de Sagone, le petit fils de Jules. Il propose un projet et après bien des atermoiements liés à des querelles avec la paroisse voisine de Saint Jean de Grève qui voit d’un mauvais œil l’extension des Carmes, les travaux ne commencèrent qu’en 1754.

    Nous méconnaissons le nom de l’architecte qui a mené à bien les travaux, Mansart ayant abandonné entre temps, moyennant une indemnité.
    Le nom de Claude Navan un architecte dominicain est parfois avancé. A-t-il repris des idées de son illustre prédécesseur ? Certains détails nous le font penser car la façade est sobre et sur un plan rectangulaire classique prolongé d’une rotonde bien que de dimensions modestes. La présence de pots à feu et de fougères comme à Saint Louis de Versailles réalisé par le même Mansart est assez caractéristique de son style.

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    Intérieur du Temple des billettes

     

    Les Carmes sont chassés à la Révolution et les bâtiments vendus. Napoléon autorise l’achat de l’ensemble par la Ville de Paris afin de l’apporter à l’église luthérienne. Nous sommes en 1808. Des aménagements intérieurs sont entrepris à cette époque puis sous Louis-Philippe, après qu’une tribune supplémentaire ait été ajoutée en 1824. Mais le style est très dépouillé, nous sommes en effet dans un temple. L’église et le cloître ont été classés en 1862.

    A la fin du XIXe siècle les bâtiments conventuels ont été transformés en école.
    Tout en restant un lieu de culte, ce site attire les mélomanes qui assistent aux nombreux concerts qui sont organisés dans l’église. Elle dispose d’ailleurs d’un orgue Mülheisen qui a 30 ans (cf notre article du 27 novembre 2012) et présente la particularité, avec ses 29 jeux, de permettre de jouer tous les styles de musique. Quant au cloître, il est fréquenté par les passants surpris de le trouver derrière les deux petites portes qui ouvrent sur la rue des Archives et attirés aussi par les expositions fréquentes qui s’y tiennent.

    Une bien curieuse histoire tout de même !

    Dominique Feutry

     

  • Les orgues du Marais, immense richesse instrumentale mais parents pauvres de la Ville de Paris

     

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    Orgues de Saint Denys du Saint Sacrement (Daublaire-Collinet) 1839 – 38 jeux

                 

    Paris est sans doute la seule ville au monde à disposer d’un patrimoine organistique aussi riche. Souvent anciens, construits par des facteurs renommés, la plupart des instruments sont rares, imposants et présentent des particularités qui expliquent leur intérêt. Généralement considérées à tort comme des biens cultuels plutôt que culturels, exception faite des instruments les plus prestigieux, les orgues n’ont pas toujours l’estime qu’elles méritent. Et pourtant leur entretien nécessite des financements qui vont bien au-delà du budget annuel de 200 000 € que consacre la Ville à leur entretien, leur restauration ou leur remplacement! Certes des événements particuliers comme les 850 ans de Notre Dame (cf notre article du 21 novembre 2012), l’appel à la générosité de certains passionnés qui prennent ces questions en main en créant une association ou bien la notoriété du titulaire de l’instrument sont de nature à faciliter l’obtention de financement. 26 orgues sont répertoriés dans les 3e et 4e arrondissements. En ce qui concerne le Marais (environ 15 instruments), tous les édifices religieux possèdent un orgue parfois deux, du fait de l’existence d’un orgue de chœur.

    Sgervaisp6 Eglise Saint Gervais-Saint Protais Orgues (41 jeux) datant du XVIIe

              

    La plupart sont du XIXe siècle. Le plus ancien est celui de l’église Saint Gervais-Saint Protais dont l’orgue d’origine sur lequel ont joué les Couperin a été remplacé par Clicquot puis restauré à plusieurs reprises, la dernière intervention datant de 2003. Signalons que l’église des Billettes a eu le privilège en 1983 de recevoir un orgue neuf, le premier financé par la Ville au cours du XXe siècle… Mais des orgues classées comme celles de Saint Denys du Saint Sacrement qui datent du début du XIXe qui ont connu plusieurs restaurations dont celle de la célèbre maison Cavaillé-Coll n’en ont plus bénéficié depuis 1970! L’orgue lui aussi Cavaillé-Coll et classé de la cathédrale Sainte Croix-Saint Jean de la rue du Perche n’a pas été remis en état depuis 1954! L’orgue Kerne classé de l’église des Blancs Manteaux  (cf notre article du 1er septembre 2012) a été refait en 1964 ! Près de 35 ans se sont écoulés depuis le relevage de l’orgue de l’Eglise Réformée de la rue Saint Antoine!

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    Orgues de l'église des Billettes (Mulheisen) 1983 – 29 jeux 

     

    En ces temps de disette budgétaire, compte tenu des différentes priorités souhaitées par la municipalité qui, rappelons-le, est propriétaire de la quasi-totalité des instruments antérieurs à 1905, l’avenir est plutôt sombre pour ce riche patrimoine « musical ». Nous pouvons juste espérer que dans les cas extrêmes et pour éviter un relevage trop coûteux ou une perte irrémédiable, les financements seront tout de même trouvés. En revanche, pour toutes les orgues qui ont besoin d’un entretien régulier, de réfections partielles, il faudra sans doute attendre de longues années sauf à imaginer de rencontrer des mécènes qui prendront le relai…ou de créer une association comme l'ont fait des personnes enthousiastes de l'instrument, aujourd'hui en cours de restauration, de l'église Saint Merri.

    Un orgue pourtant présente des avantages incomparables. Il est à la fois le témoin du passé et d’un savoir-faire toujours actuel qui se perpétue depuis des siècles et que nous devons défendre. Mais un orgue est avant tout un instrument de musique impressionnant. Son rayonnement est porteur de notoriété. Au-delà du simple rôle d’accompagnement des offices, les concerts qui sont organisés, les enregistrements qui ont lieu, les cours qu’ils permettent de dispenser attirent tous les publics et accroissent davantage leur attrait. Paris, dont le montant des fonds alloués à la restauration et l’entretien de ses orgues (près de 200 instruments concernés) a baissé de 50% en 15 ans, pourrait remettre à l'honneur, à l'instar de celui de Chartres ou de Monaco, un grand festival international d’orgue. Ce serait pour les interprètes confirmés et amateurs, pour les jeunes et leurs aînés, mais aussi pour la capitale, une formidable initiative en contrepoint des diverses fêtes nocturnes pour lesquelles des efforts financiers conséquents sont pourtant consentis.

    Dominique Feutry