Vivre le Marais, Vivre Paris Centre !

Chronique de la vie au cœur et autour du centre historique de Paris

Étiquette : Commission du Vieux Paris

  • BBB L'Hôtel de Vigny, 10 rue du Parc Royal (IIIe) vu du Square Léopold-Achille 

     

    La Commission du Vieux Paris dont les vœux sont publiés au Bulletin municipal officiel de la Ville de Paris, déclare dans le n° du 2 mai,  à propos de l'aménagement de l'Hôtel de Vigny 10 rue du Parc Royal (IIIe) (nos articles des 29 septembre 2015 et 16 décembre 2016), que "au vu des pièces modificatives déposées par la pétitionnaire (NDLR : les Thés Mariage), la Commission estimait que le nouveau projet ne répondait pas à sa demande  et maintenait le vœu pris dans la séance du 16 novembre 2016 qui préconisait que le traitement des rez-de-chaussée sur rue s'inscrive plutôt dans une logique de restitution d'un état ancien."

    Cet avis renouvelé du 22 mars qui peut très bien ne pas être suivi montre que cette restauration n'emporte pas l'unanimité et transformer en salon de thé  le bas d'un immeuble qui n'a pas été prévu pour cela n’est pas sans poser problème… Cet avis réitéré de la Commission qui veille sur ce plan en est l'illustration. 

    Espérons que la rénovation de l'Hôtel aboutisse à une réalisation réussie qui respectera le lieux. 

     

  • Pas de la mule 2 façade
    Immeuble du 2 rue du Pas de la Mule (IIIe). Beau portail avec voute en "anse de panier".

     

    On sait peu de choses sur la rue du Pas de la Mule. Simplement que son percement date de 1603 et qu'elle permet de rejoindre la place des Vosges au boulevard Beaumarchais en traversant la rue des Tournelles. Les nos pairs sont dans le IIIe, les nos impairs dans le IVe. On note qu'elle gravit une pente au-delà de cette rue pour atteindre le talus sur lequel reposent les immeubles du boulevard. On suppose qu'elle doit son nom à un dispositif dit "pas de mule" qui permettait de monter plus facilement cette rue à cheval.

    Une chronique nous apprend que dès 1560, "le premier président du parlement de Paris, Gilles Lemaistre, passait par là monté sur une mule, suivi de sa femme dans une charrette et de sa servante sur une ânesse, allant le soir voir pendre les gens qu'il avait jugés le matin". Voilà qui est parfaitement sinistre et quelque peu misogyne.

    Entrons par ce portail. On découvre une cour entourée de bâtiments XVIIIème siècle, que le PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) du Marais considère intéressants donc "à conserver et à mettre en valeur".

    Pas de la mule 2 cour intérieure

    L'édicule qu'on entrevoit sur la gauche n'a pas lui cette chance. Il est en "tâche jaune" donc "à démolir". Comme la tendance observée dans l'élaboration de la nouvelle version du PSMV est carrément en faveur de la conservation de l'existant, et que de surcroît ce bâtiment est fort utile car il abrite le gardien des immeubles, il a toutes les chances de survivre.

    Approchons nous du portail du fond en notant le caractère féerique et exhubérant du cadre, que la photo rend bien.

    Pas de la mule 2 portail cour intérieure
    On s'attend tout naturellement à trouver dans ce décor de marquise, niche, arcades et menuiseries, derrière le portail, un escalier superbe. On n'est nullement déçu.

    Pas de la mule 2 escalier
    Ce bel escalier du XVIIIème siècle avec sa rampe en fer forgé est menacé toutefois de laisser sa place à un ascenseur. C'est apparemment le voeu des propriétaires. Parions qu'il s'agit plus vraisemblablement des occupants des étages supérieurs (3ème, 4ème ?).

    La Commission du Vieux Paris en a été saisie par la Mairie de Paris. Dans sa séance plénière du 15 septembre 2011, elle a émis un avis défavorable à ce projet. Le Maire de Paris n'est pas tenu de l'écouter mais nous nous permettons de dire, en cette circonstance, qu'il serait mal avisé de ne pas le faire. Le PSMV a la particularité de protéger notre patrimoine collectif, qu'il s'agisse des constructions ou des intérieurs. Les propriétaires n'ont pas sur cet ouvrage droit de vie ou de mort. C'est ainsi que la loi est faite dans les secteurs sauvegardés comme le Marais.

    Un détail pratique nous échappe pour le moment : l'Architecte des Bâtiments de France doit se prononcer. Sa décision est sans appel : pas de visa conforme, pas de permis. Son service a-t-il déjà statué et de quelle manière ? Que les limiers de l'association aillent bd Morland consulter le dossier. Nous serons ravis de publier leurs conclusions. Il serait assez attristant, en tout cas, d'apprendre que le visa a été accordé et que le salut de l'escalier menacé ne tient plus qu'au fil d'une Parque dont le nom est "Commission du Vieux Paris".

     

    Pour agrandir les images, clic gauche jusqu'à deux fois dans la photo

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  • Gravilliers 78

    Immeuble de quatre étages, 78 rue des Gravilliers (IIIe)

                                                                                                                                        

    Faute de recul pour la prise de vue, on ne voit que les deux premiers étages et le rez-de-chaussée. S'agit-il du Marais ? Non, car on se trouve au-delà de la rue Beaubourg, limite ouest du PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur). L'avis conforme de l'Architecte des Bâtiments de France n'est pas requis. Pourquoi alors, et à quel titre, la réhabilitation de cet immeuble – qui ne fait pas rêver – a-t-elle été soumise à l'approbation de la "Commission du Vieux Paris" qui siégeait le 1er avril ?

    La réponse est liée au PLU (plan local d'urbanisme) de Paris qui a été voté pendant la précédente mandature. Il prévoyait la protection de 6.000 immeubles environ, hors PSMV du VIIe et du Marais, qualifiés pour leur valeur architecturale ou pour la mémoire qu'ils véhiculent. Leur sélection, qui a été faite, beaucoup en conviennent, avec vitesse et précipitation, n'est pas exempte de critiques.

    Ceci étant, cette protection a désormais le mérite d'exister. Elle diffère par bien des aspect du régime propre aux PSMVs (une centaine en France). En particulier, elle vise des bâtiments quand le PSMV couvre un secteur et elle ne protège pas les intérieurs.

    Son bras armé est la "Commission du Vieux Paris", qui dépend de l'Adjointe au Maire de Paris, Danièle Pourtaud, en charge du patrimoine. La commission siège tous les mois et se penche sur des projets d'urbanisme qui soulèvent des interrogations de nature patrimoniale.

    Dans le cas présent d'un immeuble visiblement abandonné mais inscrit sur la liste des bâtiments "protection Ville de Paris" et qui attend sa réhabilitation, elle s'est prononcée pour "la conservation de l'escalier existant" et s'est "opposée à la démolition des planchers d'origine".

    Il y a souvent, il est vrai, dans ce genre d'immeubles XVIIIe siècle, de jolis escaliers et des rampes qui ne demandent qu'à être rénovés et de belles poutres et solives qui en font le charme.

    Les résolutions de la commission ne sont pas exécutoires, à l'inverse de celles des Architectes des Bâtiments de France, mais il est courant que le Maire de Paris les valide et en fasse la condition d'attribution d'un permis de démolir et de construire.

    Une exception notoire est celle qui a visé l'hôtel de Mayenne, 21 rue St Antoine (IVe), où les conclusions de la commission du Vieux Paris ont été ignorées.

                                                                                                                                                 

  • St antoine 21 hôtel de mayenne gravure ancienne St antoine 21 hôtel de mayenne façade actuelle 
    L'hôtel de Mayenne, 21 rue Saint Antoine (IVe). La gravure du haut représente l'hôtel dans son état originel du début XVIIème siècle, la photo du bas le montre avec son ajout actuel, au milieu, qui date de 1889. (cliquer sur la photo pour agrandir).

      

    Nous sommes en face d'une situation étrange.

    Sur la façade rue Saint Antoine, on peut lire au tableau d'affichage la notification par le Directeur Régional des Affaires Culturelles, d'un accord pour travaux. Il s'agit de la "restauration des façades et couvertures" du bâtiment classé Monument Historique en 1974.

    Le dossier a été déposé le 23 décembre 2008 par la société qui gère l'école. Il inclut la démolition de la partie centrale du bâtiment, qui figure en "tâche jaune" (*) au PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) du Marais et le retour de l'hôtel à son état original de 1609, en application du PSMV . On relève dans les attendus "l'accord tacite du Maire de Paris". Les travaux sont financés par l'école mais au titre de la convention qui la lie à l'Etat, elle bénéficie d'une subvention. On comprend pourquoi les travaux de ravalement qui sont intervenus en 1993 n'ont concerné que les ailes du bâtiment, l'ajout au centre restant désespérément sale.

    La direction de l'école est prête à commencer les travaux mais un évènement nouveau l'incite à ne pas se précipiter : la "Commission du Vieux Paris" a voté une résolution le 1er octobre demandant de renoncer à la démolition de l'ajout.

    Elle justifie sa demande en relevant que le corps de bâtiment ajouté au-dessus du portail a été réalisé à la fin du XIXe par un architecte de renom, Alfred Coulomb, et que les orientations prises dans la révision du PSMV vont dans le sens d'une meilleure prise en compte du style XIXe. Elle insiste sur la difficulté de restaurer les parties manquantes en l'absence de documents qui les décrivent.

    Le directeur de l'école que nous avons rencontré, veut rester prudent, en insistant sur sa préoccupation essentielle qui est le bien-être et la sécurité des enfants. Ensemble, nous avons visité la salle qui serait sacrifiée : 100 m² d'une belle pièce avec vue sur la rue décorée de peintures XIXe, qui sert en ce moment de salle de musique. On comprend, malgré sa réserve, qu'il ne serait pas mécontent de conserver cet espace, même si la place ne manque pas dans l'arrière cour, à l'emplacement des anciens jardins, où plusieurs bâtiments (qu'Alexandre Gady qualifie "d'indigents") ont été construits dans les années 70.

    Du côté du Service Départemental de l'Architecture et du Patrimoine (Bâtiments de France), on ne voit aucune raison pour remettre en question un dossier qui est bouclé. Les architectes soulignent du reste que l'ajout concerné n'est pas une "oeuvre" représentative du XIXe mais un ouvrage qui "accompagne" le style Louis XIII de l'hôtel, et que les manuels consacrés au Marais qualifient de "pastiche". Elle nie qu'il soit difficile de retrouver la trace du décor original, qu'on devrait découvrir en le dégageant de son habillage actuel. Il y a eu un précédent similaire avec l'hôtel de Sully, au 62 de la même rue, dont la restauration est réussie.

    La "Commission du Vieux Paris" a un rôle consultatif auprès du Maire de Paris, qui a l'habitude de suivre ses recommandations. Elle n'a cependant pas autorité sur le Marais. C'est pourquoi elle demande que sa résolution soit portée devant la "Commission Locale du Secteur Sauvegardé" du Marais, pour qu'elle statue.

    On verra bien, puisque nous en sommes membre, si le sujet figurera à l'ordre du jour de la réunion de décembre. On pourra peut-être mesurer aussi quel peut être l'impact d'une décision de cette instance qui contreviendrait au PSMV en vigueur. N'y a-t-il pas un risque de le "détricoter" avant que le PSMV nouveau ne soit approuvé (pas avant 3 à 4 ans) ?

    Nous sollicitons ardemment l'avis de nos lecteurs. Nous nous sommes efforcés de décrire objectivement la situation et les enjeux sans prendre partie. Vos commentaires, messages, témoignages seront appréciés et pris en compte. Nous en parlerons aussi au cours de nos visites guidées dans le Marais (la prochaine a lieu le 10 décembre).

      

    (*) Les "taches jaunes" correspondent à des édifices "à démolir" au titre de la mise en valeur du patrimoine

     

    Pour rejoindre notre association agréée, loi de 1901, apolitique et culturelle, Cliquer ICI

                                                                                                                               

     

    Post Scriptum du 20 novembre 2009 :

    La résolution de la "Commission du Vieux Paris" se réfère à la charte de Venise (1964) pour la restauration des monuments anciens. Consultation de la charte