Vivre le Marais, Vivre Paris Centre !

Chronique de la vie au cœur et autour du centre historique de Paris

Étiquette : école des francs-bourgeois

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    Hôtel de mayenne vue générale avant travaux 07 11 09

    Hôtel de mayenne 24 03 21L'Hôtel de Mayenne, 21 rue St Antoine (IVe), classé monument historique en 1974, avant (en haut) et après (en bas) travaux de restauration (Photos VlM, clic gauche pour agrandir))

     

     

    Quand on voit le résultat de cette transformation et de quelle manière la restauration a rendu à ce monument son élégance originelle, on n'imagine pas qu'il y ait eu à ce propos une bataille digne d'Hernani… Et pourtant !

    La restauration de cet Hôtel, ainsi que l'Hôtel de Sully, au 62 de la même rue, dont il est le frère jumeau, figurait dans le PSMV dès 1964 (lancement du plan de sauvegarde et de mise en valeur du Marais). Il s'agissait principalement de supprimer l'ajout central (d'aucuns disaient "la verrue") ajoutée à la fin du XIXème siècle.

    Le dossier fut déposé en 2008 par son occupant, l’École des Francs-Bourgeois, soutenu par l'Architecte des Bâtiments de France et le ministère de la Culture. Le Maire de Paris, Bertrand Delanoë avait donné du bout des lèvres un "accord tacite", alors que la Maire du IVe Dominique Bertinotti y était clairement opposée. Elle reçut un soutien inattendu de la Commission du Vieux Paris qui fit valoir que l'ajout était l’œuvre d'un architecte de renom et qu'il convenait de la respecter par référence à la charte de Venise (*).

    A cette époque, le Ministère de la Culture et ses ABF disposaient de pouvoirs plus affirmés qu'aujourd'hui. Son Directeur Jean-Marc Blanchecotte maintint sa position en faisant justement remarquer que l'ajout n'était pas caractéristique de l'architecture du XIXème siècle mais plutôt un pastiche du style Louis XIII de l'édifice principal. Il donna également l'assurance que ses services disposaient de documents descriptifs de la partie recouverte et qu'il serait aisé de retrouver la trace du décor original en le dégageant de son habillage indésirable.

    Nos lecteurs ne seront pas étonnés d'apprendre que nous avons nous aussi milité pour que la restauration ait lieu. Les travaux ont duré deux ans de 2010 à 2012. Le résultat est là pour nous récompenser de notre engagement.

    GS

     

    (*) La "charte de Venise" (1964), qui a fait suite à celle d'Athènes (1931), étend la notion de monument historique au "site urbain ou rural qui porte témoignage d’une civilisation particulière, d’une évolution significative ou d’un évènement historique". A ce titre l'ajout aurait pu apparaitre comme un ouvrage à part entière avec son style propre et sa valeur patrimoniale.

     

  • St antoine 21 hôtel de mayenne gravure ancienne St antoine 21 hôtel de mayenne façade actuelle 
    L'hôtel de Mayenne, 21 rue Saint Antoine (IVe). La gravure du haut représente l'hôtel dans son état originel du début XVIIème siècle, la photo du bas le montre avec son ajout actuel, au milieu, qui date de 1889. (cliquer sur la photo pour agrandir).

      

    Nous sommes en face d'une situation étrange.

    Sur la façade rue Saint Antoine, on peut lire au tableau d'affichage la notification par le Directeur Régional des Affaires Culturelles, d'un accord pour travaux. Il s'agit de la "restauration des façades et couvertures" du bâtiment classé Monument Historique en 1974.

    Le dossier a été déposé le 23 décembre 2008 par la société qui gère l'école. Il inclut la démolition de la partie centrale du bâtiment, qui figure en "tâche jaune" (*) au PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur) du Marais et le retour de l'hôtel à son état original de 1609, en application du PSMV . On relève dans les attendus "l'accord tacite du Maire de Paris". Les travaux sont financés par l'école mais au titre de la convention qui la lie à l'Etat, elle bénéficie d'une subvention. On comprend pourquoi les travaux de ravalement qui sont intervenus en 1993 n'ont concerné que les ailes du bâtiment, l'ajout au centre restant désespérément sale.

    La direction de l'école est prête à commencer les travaux mais un évènement nouveau l'incite à ne pas se précipiter : la "Commission du Vieux Paris" a voté une résolution le 1er octobre demandant de renoncer à la démolition de l'ajout.

    Elle justifie sa demande en relevant que le corps de bâtiment ajouté au-dessus du portail a été réalisé à la fin du XIXe par un architecte de renom, Alfred Coulomb, et que les orientations prises dans la révision du PSMV vont dans le sens d'une meilleure prise en compte du style XIXe. Elle insiste sur la difficulté de restaurer les parties manquantes en l'absence de documents qui les décrivent.

    Le directeur de l'école que nous avons rencontré, veut rester prudent, en insistant sur sa préoccupation essentielle qui est le bien-être et la sécurité des enfants. Ensemble, nous avons visité la salle qui serait sacrifiée : 100 m² d'une belle pièce avec vue sur la rue décorée de peintures XIXe, qui sert en ce moment de salle de musique. On comprend, malgré sa réserve, qu'il ne serait pas mécontent de conserver cet espace, même si la place ne manque pas dans l'arrière cour, à l'emplacement des anciens jardins, où plusieurs bâtiments (qu'Alexandre Gady qualifie "d'indigents") ont été construits dans les années 70.

    Du côté du Service Départemental de l'Architecture et du Patrimoine (Bâtiments de France), on ne voit aucune raison pour remettre en question un dossier qui est bouclé. Les architectes soulignent du reste que l'ajout concerné n'est pas une "oeuvre" représentative du XIXe mais un ouvrage qui "accompagne" le style Louis XIII de l'hôtel, et que les manuels consacrés au Marais qualifient de "pastiche". Elle nie qu'il soit difficile de retrouver la trace du décor original, qu'on devrait découvrir en le dégageant de son habillage actuel. Il y a eu un précédent similaire avec l'hôtel de Sully, au 62 de la même rue, dont la restauration est réussie.

    La "Commission du Vieux Paris" a un rôle consultatif auprès du Maire de Paris, qui a l'habitude de suivre ses recommandations. Elle n'a cependant pas autorité sur le Marais. C'est pourquoi elle demande que sa résolution soit portée devant la "Commission Locale du Secteur Sauvegardé" du Marais, pour qu'elle statue.

    On verra bien, puisque nous en sommes membre, si le sujet figurera à l'ordre du jour de la réunion de décembre. On pourra peut-être mesurer aussi quel peut être l'impact d'une décision de cette instance qui contreviendrait au PSMV en vigueur. N'y a-t-il pas un risque de le "détricoter" avant que le PSMV nouveau ne soit approuvé (pas avant 3 à 4 ans) ?

    Nous sollicitons ardemment l'avis de nos lecteurs. Nous nous sommes efforcés de décrire objectivement la situation et les enjeux sans prendre partie. Vos commentaires, messages, témoignages seront appréciés et pris en compte. Nous en parlerons aussi au cours de nos visites guidées dans le Marais (la prochaine a lieu le 10 décembre).

      

    (*) Les "taches jaunes" correspondent à des édifices "à démolir" au titre de la mise en valeur du patrimoine

     

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    Post Scriptum du 20 novembre 2009 :

    La résolution de la "Commission du Vieux Paris" se réfère à la charte de Venise (1964) pour la restauration des monuments anciens. Consultation de la charte